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    Les grands chênes, pareils à de sombres amants,
    Tordent dans l’air leurs bras où pend leur chevelure,
    Et, debout sous le vent, ont la sinistre allure
    Des mornes désespoirs et des accablements.

    Comme un prince très vieux dont la tête vacille
    Sous le poids des longs jours, le bouleau maigre et blanc,
    Haut et d’argent vêtu, se dresse somnolent
    ...

  • VIEILLE HISTOIRE

    Pygmalion avait conçu sa Galatée ;
    En elle projetant son rêve intérieur,
    Il la fit si vivante et parfaite en sa fleur,
    Qu’il l’adora, l’ayant trop tendrement sculptée.

    Pâle, à genoux, buvant cette blancheur lactée
    Dont Aphrodite avait animé la froideur,
    Il la priait, le cœur brûlé par sa splendeur :
    Sa...

  • Arbres, grands végétaux, martyrs des saisons fauves.
    Sombres lyres des vents, ces noirs musiciens,
    Que vous soyez feuillus ou que vous soyez chauves,
    Le poète vous aime et vos spleens sont les siens.

    Quand le regard du peintre a soif de pittoresque,
    C’est à vous qu’il s’abreuve avec avidité,
    Car vous êtes l’immense et formidable fresque
    Dont la terre...

  • Quand les terreaux, déjà roussis et purpurins,
    Flamboient, sous les couchants mortuaires d’automne,
    On voit, d’un carrefour livide et monotone,
    Partir pour l’infini les arbres pèlerins ;

    Les pèlerins s’en vont, grands de mélancolie,
    Pensifs, pieux et lents, par les routes du soir,
    Les pèlerins géants et lourds et laissant choir
    Leur feuillage de...

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    AU soleil, le matin, les arbres sont en or ;
    Octobre leur a fait des feuilles précieuses
    Qui tremblent à la brise et, toujours anxieuses,
    Craignent le vent d’automne en qui passe la mort.

    C’est l’immobilité maintenant qu’elles aiment,
    Ou, venant à l’entour des branches voltiger,
    Le souffle inoffensif qui les frôle, léger,
    Et fait luire les...

  • La tristesse est rêveuse, et je rêve souvent ;
    La nature m’y porte, on la trompe avec peine :
        Je rêve au bruit de l’eau qui se promène,
    Au murmure du saule agité par le vent.
    J’écoute : un souvenir répond à ma tristesse ;
    Un autre souvenir s’éveille dans mon cœur :
    Chaque objet me pénètre, et répand sa couleur
            Sur le sentiment qui m’...

  • Le vieux Daçaratha, sur son siège d’érable,
    Depuis trois jours entiers, depuis trois longues nuits,
    Immobile, l’œil cave et lourd d’amers ennuis,
              Courbe sa tête vénérable.

    Son dos maigre est couvert de ses grands cheveux blancs,
    Et sa robe est souillée. Il l’arrache et la...

  • Le vieux Daçaratha, sur son siège d’érable,
    Depuis trois jours entiers, depuis trois longues nuits,
    Immobile, l’œil cave et lourd d’amers ennuis,
           Courbe sa tête vénérable.

    Son dos maigre est couvert de sesgrands cheveux blancs^
    Et sa robe est souillée. Il l’arrache et la froisse.
    Puis il gémit tout bas, pressant avec angoisse
           Son cœur de...

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    Il reprit :

                              « O vous tous, mangeant, buvant, dormant
    Sous le Ciel qui s’entr’ouvre impénétrablement,
    Puissiez-vous, par cet homme à qui je la révèle,
    Apprendre, ô surdités aveugles ! la Nouvelle
    Que savent mon oreille et mes yeux revenus
    Du voyage à travers les mondes inconnus !

    Au-dessus des Enfers, sous le Ciel...

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    Arcas
     
    Tu poursuis Damalis. Mais cette blonde tête
    Pour le joug de Vénus n'est point encore prête.
    C'est une enfant encore; elle fuit tes liens,
    Et ses yeux innocents n'entendent pas les tiens.
    Ta génisse naissante au sein du pâturage
    Ne cherche aux bords des eaux que le saule et l'ombrage ;
    Sans répondre à la voix des époux mugissants,...