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    Adieu, toi dont la main sur ma pâle existence
    De quelques jours heureux a répandu les fleurs,
    Toi qui seul as voulu de mon adolescence
    Plaindre et partager les douleurs !

    Adieu ! Mais ton image en mon âme attendrie
    Vivra malgré l'espace et les ans destructeurs ;
    La mer peut t'éloigner du sol de ma patrie,
    Mais ne peut séparer nos cœurs.

    ...
  • Allons, ange déchu, ferme ton aile rose ;
    Ôte ta robe blanche et tes beaux rayons d’or ;
    Il faut, du haut des cieux où tendait ton essor,
    Filer comme une étoile, et tomber dans la prose.

    Il faut que sur le sol ton pied d’oiseau se pose.
    Marche au lieu de voler : il n’est pas temps encor ;
    Renferme dans ton cœur l’harmonieux trésor ;
    Que ta harpe un...

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    Il est une heure de silence
    Où la solitude est sans voix,
    Où tout dort, même l’Espérance;
    Où nul zéphyr ne se balance
    Sous l’ombre immobile des bois;

    Il est un âge où de la lyre
    L’âme aussi semble s’endormir,
    Où du poétique délire
    Le souffle harmonieux expire
    Dans le sein qu’il faisait frémir.

    L’oiseau qui...

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    Hélas ! rapide météore,
    Trop vite elle a fui loin de nous.
    (BERANGER.)

    Tu vas partir : vers un autre rivage,
    Sourde à nos vœux, tu diriges tes pas.
    Ah ! quels succès vaudront le pur hommage
    Qu’en t’admirant je t’adressais tout bas ?

    Comme un oiseau venu d’une autre terre,
    Un seul moment a nos yeux tu parus.
    Tu...

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    L'airain avait sonné l'hymne pieux du soir.
    Sur les temples de Rome, où cessait la prière,
    La lune répandait sa paisible lumière :
    Au Forum à pas lents, triste, j'allai m'asseoir.
    J'admirais ses débris, ses longs portiques sombres,
    Et dans ce jour douteux, par leur masse arrêté,
    Tous ces grands monuments empruntaient de leurs ombres
    Plus de...

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    AU seuil de la maison dont vous étiez l’exemple,
    Nous demeurons pensifs, alors que vous partez,
    Alexis ! — Car, en vous, notre regret contemple
    L’honneur de tant de jours par des succès comptés !

    Un demi-siècle est là qui garde la mémoire
    Des types immortels que votre âme anima.
    Un demi-siècle entier que l’Art, dans son histoire,
    Met votre nom...

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    Adieu, j’entends la mort qui s’approche et m’appelle ;
    Mon âme est sur le seuil de l’immortalité ;
    Encor quelques instants, et déployant son aile,
    Elle découvrira ce qu’est l’éternité.

    Elle découvrira ce qu’elle est elle-même,
    Et faisant à la terre un solennel adieu
    Humble et purifiée à cette heure suprême
    Entre elle et le néant, elle trouvera...

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    Devota morti, et consecrata victima
    projeci amorem lucis.
    BUCHANAN, Jephté.

    En ma jeune saison j’aimai d’amour extrême ;
    J’ai reposé ma bouche aux lèvres de Lénor.
    Hélas ! j’aurai sans doute offensé ce que j’aime ;
    Lénor de ses baisers m’a repris le trésor.

    Oui Lénor, j’ai failli, car je fus trop fidèle.
    Un nom...

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    Poète, en vain tu me compares
    Au rossignol, barde des airs ;
    Je crains l’éclat dont tu me pares,
    Je crains de trop croire à tes vers.

    Mes lèvres, de bonheur muettes,
    Boiraient au miel de tes accents ;
    Car, tu le sais, dieux et poètes,
    Ami, se nourrissent d’encens.

    Gardons le sceptre à de plus dignes !
    Ma muse est ta plus humble...

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    I

    Dans les villes, tombeaux dont le peuple croit vivre,
    Où s'agitent des morts par des morts coudoyés,
    Où l'âme aspire un air qui la tue ou l'enivre,
    Ceux qui sont nés à Dieu sont bientôt oubliés.

    Là, des spectres faisant de l'ombre et du tumulte,
    Vous cachent à mes yeux, vous-même, ô mon ami !
    Et j'omets tout un jour de vous rendre mon culte...