• Aimable abbé, dans Paris autrefois
    la volupté de toi reçut des lois ;
    les ris badins, les grâces enjouées,
    à te servir dès longtemps dévouées,
    et dès longtemps fuyant les yeux du roi,
    marchaient souvent entre Philippe et toi,
    te prodiguaient leurs faveurs libérales,
    et de leurs mains marquaient dans leurs annales,
    en lettres d’or, mots et contes...

  • Toi que le ciel jaloux ravit dans son printemps ;
    toi de qui je conserve un souvenir fidèle,
    vainqueur de la mort et du temps ;
    toi dont la perte, après dix ans,
    m’est encore affreuse et nouvelle ;
    si tout n’est pas détruit ; si, sur les sombres bords,
    ce souffle si caché, cette faible étincelle,
    cet esprit, le moteur et l’esclave du corps,
    ce je...

  • Rimeur charmant, plein de raison,
    philosophe entouré des grâces,
    épicure, avec Apollon,
    s’empresse à marcher sur vos traces.
    Je renonce au fatras obscur
    du grand rêveur de l’oratoire,
    qui croit parler de l’esprit pur,
    ou qui veut nous le faire accroire,
    nous disant qu’on peut, à coup sûr,
    entretenir Dieu dans sa gloire.
    Ma raison n’a...

  • Ceci te doit être remis
    par un abbé de mes amis,
    homme de bien, quoique d’église.
    Plein d’honneur, de foi, de franchise,
    en lui les dieux n’ont rien omis
    pour en faire un abbé de mise :
    même Phébus le favorise.
    Mais dans son coeur Vénus a mis
    un petit grain de gaillardise.
    Or c’est un point qui scandalise
    son curé, plus gaillard que...

  • Philis, qu’est devenu ce temps
    où dans un fiacre promenée,
    sans laquais, sans ajustements,
    de tes grâces seules ornée,
    contente d’un mauvais soupé
    que tu changeais en ambrosie,
    tu te livrais, dans ta folie,
    à l’amant heureux et trompé
    qui t’avait consacré sa vie ?
    Le ciel ne te donnait alors,
    pour tout rang et pour tous trésors,...

  • Tressan, l’un des grands favoris
    du dieu qui fait qu’on est aimable,
    du fond des jardins de Cypris,
    sans peine, et par la main des ris,
    vous cueillez ce laurier durable
    qu’à peine un auteur misérable,
    a son dur travail attaché,
    sur le haut du Pinde perché,
    arrache en se donnant au diable.
    Vous rendez les amants jaloux ;
    les auteurs...

  • Le curé qui vous baptisa
    du beau surnom de muse et grâce ,
    sur vous un peu prophétisa ;
    il prévit que sur votre trace
    croîtrait le laurier du Parnasse
    dont La Suze se couronna,
    et le myrte qu’elle porta,
    quand, d’amour suivant la déesse,
    ses tendres feux elle mêla
    aux froides ondes du permesse.
    Mais en un point il se trompa :
    ...

  • Tu commences par me louer,
    tu veux finir par me connaître :
    tu me loueras bien moins. Mais il faut t’avouer
    ce que je suis, ce que je voudrais être.
    J’aurai vu dans trois ans passer quarante hivers.
    Apollon présidait au jour qui m’a vu naître.
    Au sortir du berceau j’ai bégayé des vers.
    Bientôt ce dieu puissant m’ouvrit son sanctuaire :
    mon coeur...

  • ô très-singulière Martel,
    j’ai pour vous estime profonde :
    c’est dans votre petit hôtel,
    c’est sur vos soupers que je fonde
    mon plaisir, le seul bien réel
    qu’un honnête homme ait en ce monde.
    Il est vrai qu’un peu je vous gronde ;
    mais, malgré cette liberté,
    mon coeur vous trouve, en vérité,
    femme à peu de femmes seconde ;
    car sous...

  • Jeune Gaussin, reçois mon tendre hommage,
    reçois mes vers au théâtre applaudis ;
    protége-les : Zaïre est ton ouvrage ;
    il est à toi, puisque tu l’embellis.
    Ce sont tes yeux, ces yeux si pleins de charmes,
    ta voix touchante, et tes sons enchanteurs,
    qui du critique ont fait tomber les armes ;
    ta seule vue adoucit les censeurs.
    L’illusion, cette...