• C’est un bazar, au bout des faubourgs rouges :
    Étalages bondés, éventaires ventrus.
    Tumulte et cris brandis, gestes bourrus et crus,
    Et lettres d’or, qui soudain bougent,
    En torsades, sur la façade.

    Chaque matin, on vend, en ce bazar,
    Parmi les épices, les fards
    Et les drogues omnipotentes,
    À bon marché, pour quelques sous,...

  • Be m’an perdut lai enves Ventadorn
    Tuih mei amic, pois ma domna no m’ama!
    Et es be dreihz que ja mais lai no torn,
    C’ades estai vas me salvatj’ e grama.
    Ve.us per que.m fai semblan irat e morn:
    Car en s’amor me deleih e.m sojorn
    Ni de ren als no.s rancura ni.s clama .

    Aissi co.l peis qui s’eslaiss’ el cadorn
    E no.n sap mot, tro que s’es pres en...

  • Be.m cuidei de chantar sofrir
    Entro lai el doutz tems suau !
    Eras, pus negus no s’esjau
    E pretz e donar vei morir,
    No posc mudar no prenha cura
    D’un vers novel a la frejura,
    Que conortz er als autres entre lor!
    E cove.m be, pois tan be.m vai d’amor,
    C’aya melhor solatz a tota gen .

    Domna, vas cal que part que.m vir,
    Ab vos remanh et...

  • On a dit, non sans vérité et profondeur, que pour l'artiste, pour le poète, l'inspiration : c'est la femme. On peut noter, en effet, comme un trait distinctif de l'âme poétique, cette faculté d'adoration, cette sorte de nostalgie de la pure beauté entrevue ou rêvée sous la forme de l'éternel féminin, qui est comme une intime et mystérieuse aspiration, un élan spontané vers les splendeurs de la...

  • Qu’avez-vous, dites-moi,
    Beau page de la reine ?
    Qu’avez-vous, dites-moi,
    Gentil menin du roi ?

    Madame a les yeux doux
    Et vous portez sa traîne,
    Madame a les yeux doux :
    Pourquoi donc pleurez-vous ?

    — Hélas ! je ne suis rien
    Qu’un enfant qui soupire ;
    Hélas ! je ne suis rien,
    L’amour est tout mon bien.

    Si je n’aimais...

  • Beaulté mortelle icy en vain souspire,
    Puis que la Mort le corps soubdain ravit.
    Mais Vertu vive, & qui jamais n’empire,
    Comme l’Esprit au Ciel, en Terre vit.

    Si grand Esprit se sentant a malaise
    D’estre en son corps estroictement enclos,
    Comme un gros feu en estroicte fournaise,
    Ne peut durer longuement en son clos.

    Aussi afin que plus ne...

  •  
    Eh quoi ! vous vous plaignez, vous aussi, de la vie !
    Vous avez des douleurs, des ennuis, des dégoûts !
    Un dard sans force aux yeux, sur la lèvre une lie,
    Et du mépris au cœur ! ― Hélas ! c’est comme nous !
    Lie aux lèvres ? ― poison, reste brûlant du verre ;
    Dard aux yeux ? ― rapporté mi-brisé des combats ;
    Et dans le cœur mépris ? ― Éternel...

  •  
    D’autres hommes, parmi ceux-là qui sont mes frères,
    Saisiront dans leurs poings, la houe au dur tranchant,
    Et du sombre terroir des larves funéraires
    Défricheront la glèbe et rouvriront le champ.

    D’autres encore, avec des ongles redoutables,
    Fouilleront l’inconnu des antiques limons,
    Et, de leurs doigts sanglants, déchiffreront les tables
    Du...

  •  
    Splendeur excessive, implacable,
    Ô beauté, que tu me fais mal !
    Ton essence incommunicable,
    Au lieu de m’assouvir, m’accable :
    On n’absorbe pas l’idéal.

    L’éternel féminin m’attire,
    Mais je ne sais comment l’aimer.
    Beauté, te voir n’est qu’un martyre,
    Te désirer n’est qu’un délire,
    Tu n’offres que pour affamer !

    Je porte...