Beau Page de la Reine

Qu’avez-vous, dites-moi,
Beau page de la reine ?
Qu’avez-vous, dites-moi,
Gentil menin du roi ?

Madame a les yeux doux
Et vous portez sa traîne,
Madame a les yeux doux :
Pourquoi donc pleurez-vous ?

— Hélas ! je ne suis rien
Qu’un enfant qui soupire ;
Hélas ! je ne suis rien,
L’amour est tout mon bien.

Si je n’aimais pas tant,
Comme il ferait bon rire !
Si je n’aimais pas tant,
J’aurais le cœur content.

— Madame a dans les yeux
Le bleu de la pervenche,
Madame a dans les yeux
Quelque chose des deux.

Madame entre ses doigts
Tient une rose blanche,
Madame entre ses doigts
Tient la rose des bois,

Et ses cheveux dorés
Comme la fraîche aurore,
Et ses cheveux dorés
Ont la senteur des prés.

— Ah ! plutôt des lilas,
J’en pleurerais encore,
Ah ! plutôt des lilas,
Mais ne m’en parlez pas.

— Bah ! souriez un peu,
Beau page de la reine ;
Bah ! souriez un peu,
Beau page rose et bleu.

— Non, j’ai trop écouté
Le chant de la sirène ;
Non, j’ai trop écouté
Le rossignol d’été.

Entre les deux sentiers
Qui vont à la rivière,
Entre les deux sentiers
Recouverts d’églantiers,

Du côté du Levant,
Dans une chènevière,
Du côté du Levant,
Est un petit couvent.

C’est l’a que bien caché
Au fond d’une cellule,
C’est là que bien caché,
J’expierai mon péché.

Mais lorsque tendrement
Viendra le crépuscule,
Mais lorsque tendrement
Luira le firmament,

Du haut de la grand’tour
Qui regarde la plaine,
Du haut de la grand’tour,
J’épierai ton retour,

O mon royal trésor,
Ma blonde châtelaine,
O mon royal trésor,
Ma reine aux cheveux d’or.

Collection: 
1890

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