• Un beau soir, par une lunette
    Je contemplais les vastes cieux
    Et voyais là chaque planète
    Suivre son cours mystérieux,
    La plus distante de la terre,
    Saturne à l’imposante sphère,
    Captivait surtout mes pensers,
    Et sur sa rondeur lumineuse,
    D’une façon presque fiévreuse,
    Je tenais mes regards fixés.

    Comme un roi dans les plaines brunes...

  • Je la suivais, frôlant du pied sa robe blanche
    Qui traînait en longs plis sur les herbes du pré,
    Et livrait le secret des lignes de sa hanche
    Aux regards alanguis de Vesper empourpré.

    Elle allait… & sa main qui sortait de sa manche
    Toute mignonne & douce, oiseau d’ivoire ambré,
    D’un geste de statue élevait une branche
    Qu’elle avait arrachée...

  • Des vases blancs & bleus sur leurs tiges dorées,
    Droits, & fiers de la pourpre exotique des fleurs ;
    Une lampe d’albâtre avivant ses pâleurs,
    Clair de lune neigeux & calme des soirées ;

    Des panneaux, où la main féminine agrafa
    Sur le satin, lamé d’or & d’argent, des armes ;
    Un sachet, exhalant la fleur des anciens charmes
    Dans l’...

  • Pierre, le Bien-Nommé, revient de Palestine.
    Jadis il est sorti, bardé de fer, & tel
    Il rentre sous la porte antique du castel
    Qu’une fière devise à la gloire destine.

    Dans l’oratoire bleu madame Valentine
    Pour l’époux éloigné tremble au pied de l’autel,
    Et de blancs chérubins vers le Père immortel
    Guident, le long des cieux, la prière enfantine...

  • Les Titans sont tombés : — dans l’air silencieux
    Leur sang pur monte encore, &, comme une fumée,
    Emporte dans les cieux leur âme consumée
    Des rêves éternels qu’ils avaient pris aux cieux.

    La terre, maternelle aux cœurs audacieux,
    Sur ses enfants meurtris lentement s’est fermée ;
    Mais, pour longtemps tari, son flanc capricieux
    Tira de leur semence...

  • Lorsque Jésus fut mort, & comme une auréole
    S’allumait bleue au front blanc du Nazaréen,
    Plus pâle qu’un cadavre & plus tremblant qu’un chien,
    Le bon larron, prenant brusquement la parole :

    « Compagnon, que dis-tu de tout ceci ? — Moi ? Rien,
    Répondit le mauvais larron, Rien, âme molle,
    Rien, ô cerveau chétif qu’un tel prodige affole,
    Sinon qu...

  • Ce jour, premier septembre, un beau coléoptère
    (Clytus arcuatus de Fabrice ou Linné)
    Voltige soucieux. Ce tardif nouveau-né
    Ne pourra découvrir aucun des siens sur terre.

    Dans la grande forêt au multiple mystère,
    De tant d’hôtes vivants Éden prédestiné,
    Sur ses bûches de chêne il va, vient, condamné,
    Pauvre être intempestif, à mourir solitaire...

  • Plus grave qu’un Sachem, Théo, dans sa demeure,
    Fume avec ses amis le calumet de paix.
    Un nuage azuré, suspendu comme un dais.
    Se balance léger sur les fronts qu’il effleure.

    Bons propos & devis font la chère meilleure.
    Le hardi paradoxe, à table, aide au palais ;
    Sur sa nappe accoudé, ce maître Rabelais
    Égrène, en discourant, le chapelet de l’...

  • ISEULT.

    Ô timide héros oublieux de mon rang,
    Vous n’avez pas daigné saluer votre dame !
    Vos yeux bleus sont restés attachés sur la rame.
    Osez voir sur mon front la fureur d’un beau sang.

    TRISTAN.

    J’observe le pilote assoupi sur son banc,
    Afin...

  • Souvent, lorsqu’au retour des mauvaises saisons
    La mort a moissonné dans certaines maisons,
    Les premiers jours passés, comme le veut l’usage,
    J’y cours, me composant en chemin un visage,
    Et roulant une ou deux phrases, dans mon cerveau,
    Qui de la circonstance atteignent le niveau.
    J’entre… Un charmant sourire accueille ma visite ;
    Je regarde à deux...