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    Quand tu dormais sous la ramée,
    Frêle oiseau, sans ailes encor,
    Invisible et de ruse armée,
    Une main sur toi s’est fermée
    Et du ciel priva ton essor.

    Et tu grandis dans l’esclavage,
    Exilé de l’air et des bois,
    Rêvant peut-être un lieu sauvage
    Plein de silence et de feuillage,
    Où libre pût monter ta voix.

    Quand tu parus dans...

  • Pendant que vostre main docte, gentille et belle
    Va triant dextrement les odorantes fleurs
    Par ces prez esmaillez en cent et cent couleurs,
    Par le sacré labeur de la troupe immortelle :

    Gardez qu'Amour tapy sous la robe nouvelle
    De quelque belle fleur n'evente ses chaleurs,
    Et qu'au lieu de penser amortir vos douleurs,
    D'un petit traict de feu ne...

  • Objet divin des âmes et des yeux,
    Reine, le chef-d'oeuvre des cieux :
    Quels doctes vers me feront avouer
    Digne de te louer ?

    Les monts fameux des vierges, que je sers
    Ont-ils des fleurs en leurs déserts,
    Qui s'efforçant d'embellir ta couleur,
    Ne ternissent la leur ?

    Le Thermodon a su seoir autrefois,
    Des reines au trône des rois :
    ...

  • Après une chaleur si dure
    Tout se rafraîchit pour l'instant.
    La pluie est absorbée autant
    Par le roc que par la verdure.

    Terrains noirs, sillons bruns et roux,
    Prés et bois, les pentes, les trous,
    Toute la campagne qui songe
    S'en imbibe, la boit, l'éponge.

    Les pauvres herbes altérées,
    Les mousses du val, du coteau,
    La...

  • Les étoiles, points d'or, percent les branches noires ;
    Le flot huileux et lourd décompose ses moires
    Sur l'océan blêmi ;
    Les nuages ont l'air d'oiseaux prenant la fuite ;
    Par moments le vent parle, et dit des mots sans suite,
    Comme un homme endormi.

    Tout s'en va. La nature est l'urne mal fermée.
    La tempête est écume et la flamme est fumée.
    ...

  • Si vous continuez d'être ainsi toute pâle
    Dans notre air étouffant,
    Si je vous vois entrer dans mon ombre fatale,
    Moi vieillard, vous enfant ;

    Si je vois de nos jours se confondre la chaîne,
    Moi qui sur mes genoux
    Vous contemple, et qui veux la mort pour moi prochaine,
    Et lointaine pour vous ;

    Si vos mains sont toujours diaphanes et...

  • Pendant que le marin, qui calcule et qui doute
    Demande son chemin aux constellations ;
    Pendant que le berger, l'oeil plein de visions,
    Cherche au milieu des bois son étoile et sa route ;
    Pendant que l'astronome, inondé de rayons,

    Pèse un globe à travers des millions de lieues,
    Moi, je cherche autre chose en ce ciel vaste et pur.
    Mais que ce...

  • La barque est petite et la mer immense ;
    La vague nous jette au ciel en courroux,
    Le ciel nous renvoie au flot en démence :
    Près du mât rompu prions à genoux !

    De nous à la tombe, il n'est qu'une planche.
    Peut-être ce soir, dans un lit amer,
    Sous un froid linceul fait d'écume blanche,
    Irons-nous dormir, veillés par l'éclair !

    Fleur du...