• Croyez qu’un vieillard cacochyme,
    chargé de soixante et douze ans,
    doit mettre, s’il a quelque sens,
    son âme et son corps au régime.
    Dieu fit la douce illusion
    pour les heureux fous du bel âge ;
    pour les vieux fous l’ambition,
    et la retraite pour le sage.
    Vous me direz qu’Anacréon,
    que Chaulieu même, et Saint-Aulaire,
    tiraient encor...

  • Si vous brillez à votre aurore,
    quand je m’éteins à mon couchant ;
    si dans votre fertile champ
    tant de fleurs s’empressent d’éclore,
    lorsque mon terrain languissant
    est dégarni des dons de Flore ;
    si votre voix jeune et sonore
    prélude d’un ton si touchant,
    quand je fredonne à peine encore
    les restes d’un lugubre chant ;
    si des graces...

  • Aimable amant de Polymnie,
    jouissez de cet âge heureux
    des voluptés et du génie ;
    abandonnez-vous à leurs feux :
    ceux de mon âme appesantie
    ne sont qu’une cendre amortie,
    et je renonce à tous vos jeux.
    La fleur de la saison passée
    par d’autres fleurs est remplacée.
    Une sultane avec dépit,
    dans le vieux sérail délaissée,
    voit la...

  •  
      Ô femmes, c’est pour vous que j’accorde ma lyre ;
    Ô femmes, c’est pour vous qu’en mon brûlant délire,
    D’un usage orgueilleux, bravant les vains efforts,
    Je laisse enfin ma voix exprimer mes transports.
    Assez et trop longtemps la honteuse ignorance
    A jusqu’en vos vieux jours prolongé votre enfance ;
    Assez et trop longtemps les hommes, égarés,
    ...

  •  
    Sous un règne propice à la gloire des arts,
    Près du calme des champs, non loin de nos remparts,
    S’éleva cette tour paisible et révérée,
    A l’étude des cieux par Louis consacrée.
    Je vins sur sa hauteur méditer quelquefois :
    L’auguste poésie anime encor sa voix,
    En contemplant les cieux dont elle est descendue ;
    Son audace a besoin de leur vaste...

  •  
    Vois, ma Thaïs, cette vigne amoureuse
    Se marier à ce jeune arbrisseau ;
    Vois le lierre embrasser l’ormeau
    De sa guirlande tortueuse.
    Puissent tes bras voluptueux
    Me serrer, m’enchaîner de même !
    Puissé-je par autant de noeuds,
    T’enlacer, te presser, te ceindre de mes feux,
    Me replier cent fois autour de ce que j’aime,
    Et puissions-...

  •  
    Pourquoi donc, matrônes austères,
    Vous alarmer de mes accens ?
    Vous, jeunes filles trop sévères,
    Pourquoi redoutez-vous mes chants ?
    Ai-je peint les enlèvemens,
    Des passions les noirs ravages,
    Et ces impétueux orages
    Qui naissent aux coeurs des amans ?
    Je célèbre des jeux paisibles,
    Qu’envain on semble mépriser,
    Les vrais bien...

  •       Une fauvette, dont la voix
    Enchantait les échos par sa douceur extrême,
    Espéra surpasser le rossignol lui-même,
    Et lui fit un défi. L’on choisit dans le bois
    Un lieu propre au combat : les juges se placèrent;
          C’étaient le linot, le serin,
          Le rouge-gorge et le tarin.
    Tous les autres oiseaux derrière eux se perchèrent.
    Deux vieux...

  •  
    Dans un sentier passe un cheval
    Chargé d'un sac et d'une fille ;
    J'observe, en passant, le cheval,
    Je jette un coup-d'oeil sur la fille ;
    Voilà, dis-je, un fort beau cheval ;
    Qu'elle est bien faite cette fille !
    Mon geste fait peur au cheval,
    L'équilibre manque à la fille ;
    Le sac glisse en bas du cheval,
    Et sa chute entraîne la...

  • Nos jardins orgueilleux dédaignent la culture
    De vos chastes attraits naïves fleurs des champs,
              Enfants trouvés de la nature !
    Mais vous êtes pour moi des objets ravissante ;
    Par vous je me retrouve aux étés du jeune âge,
    Quand simple bouton d’or, paquerette sauvage,
    Plus que l’or et l’argent éblouissaient mes sens.

    Vous créez pour mon cœur...