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    Entouré de flacons, d’étranges serpentins,
    De fourneaux, de matras aux encolures torses,
    Le chimiste, sondant les caprices des forces,
    Leur impose avec art des rendez-vous certains.

    Il règle leurs amours jusque-là clandestins,
    Devine et fait agir leurs secrètes amorces,
    Les unit, les provoque à de brusques divorces,
    Et guide utilement-leurs...

  • Le monde est méchant, ma petite :
    Avec son sourire moqueur
    Il dit qu’à ton côté palpite
    Une montre en place de cœur.

    — Pourtant ton sein ému s’élève
    Et s’abaisse comme la mer,
    Aux bouillonnements de la sève
    Circulant sous ta jeune chair.

    Le monde est méchant, ma petite :
    Il dit que tes yeux vifs sont morts
    Et se meuvent dans leur...

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    Le monde est un jardin de plaisir et de mort,
    Où l’ombre sous les bleus feuillages semble attendre,
    Où la rose s’effeuille avec un bruit de cendre,
    Où le parfum des lys est volontaire et fort ?

    Parmi les lys nouveaux et les roses suprêmes,
    Nous mêlons nos aveux à d’antiques sanglots…
    Le monde est le jardin où tout meurt, les pavots
    Et les...

  • Disséminant la guerre
    Par régiments entiers à travers monts et terres,
    Au long du sombre Oder et de l’Elbe et du Rhin,
    Claquent
    ...

  • Utopistes que nous sommes,
    Comme on doit nous trouver fous !
    Vouloir le bonheur des hommes
    Mais de quoi nous mêlons-nous ?
    Mieux vaut chanter à la ronde
    Et boire à plein gobelet ;
    Ne dérangeons pas le monde,
    Laissons chacun comme il est !

    Leur logique m’exaspère.
    Ils répondent : « C’est la loi !
    J’ai fait comme a fait mon père ;...

  • Onc Perle nette en vif, & petit monde
    Son per n’eut tant en sçavoir, & faconde,
    Que ceste n’ayt amoindry, qui gist cy :
    De qui l’esprit par Mort non obscurcy
    Demonstra bien, durant sa maladie
    Quelz sainctz propos, sçavoirs, & melodie
    Elle avoit sceu, & apprins de soymesmes,
    Tant qua sa fin proposa si haultz thesmes,
    Qu’on la...

  • Pour un petit moment que tu dois vivre au monde
    Pourquoy te bastis tu une habitation
    De si haute grandeur que sa construction
    Semble chocquer du ciel la cambreure profonde ?

    Cain fust le premier qui sur la terre ronde
    Dressa une cité, duquel l’invention
    Incontinant en queue eut sa punition,
    Perdant du ciel heureus la lumiere seconde.

    Si tu...

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    Ô puissant Gutenberg ! Germain de bonne race
             Dont le mâle et hardi cerveau
    De l’antique univers a rajeuni la face
             Par un prodige tout nouveau ;
    Lorsqu’aux rives du Rhin, dans une nuit ardente,
             Amant d’une divinité,
    Tu pressas sur ton sein la poitrine fervente
             De l’immortelle liberté,
    Tu crus sincèrement...

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    À Alfred Guérard.

    I

    Et le cèdre, debout sur le mont solitaire,
    Disait : Béni soit Dieu, qui du sein de la terre
    Fait monter comme un flot la sève dans mes flancs ;
    Béni soit le Seigneur qui, pour moi seul au monde,
    Garde dans ses trésors et la fraîcheur féconde,
    Et les rayons étincelants !
     
    Je suis le fils aîné de la...

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    I

    Sur son trône d’argent aux degrés de porphyre,
    Calme, comme les dieux qui peuvent se suffire,
    Le roi, ceint du bandeau par l’orgueil allégé,
    Dans la pourpre de Tyr est mollement plongé ;
    Il a pour escabeau digne de ses sandales
    Les crins de deux lions assoupis sur les dalles ;
    La hache, à ses côtés, veille au bras des licteurs.
    Le...