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    Eh bien ! mêle ta vie à la verte forêt !
    Escalade la roche aux nobles altitudes.
    Respire, et libre enfin des vieilles servitudes,
    Fuis les regrets amers que ton cœur savourait.

    Dès l’heure éblouissante où le matin paraît,
    Marche au hasard ; gravis les sentiers les plus rudes.
    Va devant toi, baisé par l’air des solitudes,
    Comme une biche en...

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    Jeune fille, crois-moi, s’il en est temps encore,
    Choisis un fiancé joyeux, à l’œil vivant,
    Au pas ferme, à la voix sonore,
    Qui n’aille pas rêvant.

    Sois généreuse, épargne aux cœurs de se méprendre.
    Au tien même, imprudente, épargne des regrets,
    N’en captive pas un trop tendre,
    Tu t’en repentirais.

    La nature t’a faite indocile et rieuse...

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    SI ton cœur est souffrant et si tu crains la vie,
    Fixe, comme une étoile au ciel, ton idéal ;
    Fuis le monde méchant, fuis l’amour, fuis le mal.
    Le bonheur est au bout de la route gravie.

    Tu rougiras de sang les pierres du chemin :
    Qu’importe, si ton âme, en s’élevant, s’épure !
    Tu trouveras une eau pour laver ta blessure,
    La fontaine est là-...

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    Pour vous, enfants, le monde est une nouveauté ;
    De leur nid vos vertus, colombes inquiètes,
    Regardent en tremblant les printanières fêtes
    Et cherchent le secret d’y vivre en sûreté.

    Le voici : n’aimez l’or que pour sa pureté ;
    N’aimez que la candeur dans vos blanches toilettes ;
    Et si vous vous posez au front des violettes,
    Aimez la modestie...

  • I


    ...

  • Dulmas, écoute enfin la raison qui t’éclaire,
    Cesse enfin de nourrir un espoir téméraire;
    Ainsi que toi, mon fils, j’eus la démangeaison
    D’offenser le public, la rime et la raison;
    Comme toi, bel esprit, au sortir du collège,
    Ma sotte vanité saisit le privilège
    Qu’usurpent trop souvent les auteurs de nos jours,
    De parler sans rien dire et de parler...

  • Quand sur vos cheveux blonds, et fauves au soleil,
    Vous mettez des rubans de velours noir, méchante,
    Je pense au tigre dont le pelage est pareil :
    Fond roux, rayé de noir, splendeur de l'épouvante.

    Quand le rire fait luire, au calice vermeil
    De vos lèvres, l'éclair de nacre inquiétante,
    Quand s'émeut votre joue en feu, c'est un réveil
    De tigre :...

  • Prothee tel qu'a feint le vieux poëte Homere
    Qui en plusieurs façons se souloit varier
    Ne s'eust laissé dormant par Atride atraper
    Sans l'advertissement d'Idothe debonnaire.

    Et n'eust du Dieu marin tiré responce vaine
    Pour se pouvoir sauver et les compagnons siens :
    Mais miserable moy qui par dommages miens
    Preuve la fiction d'Homere trescertaine....

  • Nulle pourpre aujourd'hui dans le gris vespéral ;
    Le jour meurt simplement comme une âme lassée,
    Et voici que du ciel uniforme et claustral
    Une paix de couvent tombe sur ma pensée.

    J'accepte le conseil religieux du soir
    Qui m'édifie un pacifique monastère,
    Et mon rêve, oublieux et calme, ira s'asseoir
    Au jardin monacal plein de chaste mystère....

  • Muse, conseil ; lequel il me faut prendre
    Pour reposer. Le frais, l'ombre ou le vert
    Que ce ruisseau, ce bois, ce pré ouvert
    Me veut donner, me fournir et m'estendre.

    Son cours, son ombre et son herbage tendre
    Est-il trop froid, trop noir, trop descouvert ?
    Parle bien tost, car la fraischeur se perd,
    Le vert fannit, l'ombre ne veut attendre....