• X

    Si vous continuez d'être ainsi toute pâle
    Dans notre air étouffant,
    Si je vous vois entrer dans mon ombre fatale,
    Moi vieillard, vous enfant ;

    Si je vois de nos jours se confondre la chaîne,
    Moi qui sur mes genoux
    Vous contemple, et qui veux la mort pour moi prochaine,
    Et lointaine pour vous ;

    Si vos mains...

  •  
    C’était au milieu de la nuit,
    Une longue nuit de décembre ;
    Le feu, qui s’éteignait sans bruit,
    Rougissait par moments la chambre.

    On distinguait des rideaux blancs,
    Mais on n’entendait pas d’haleine ;
    La veilleuse aux rayons...

  • Une fois j’aperçus, au fond d’un pêle-mêle
    De ronces, de cailloux & de buissons obscurs,
    Une rose pendue au bout d’un rameau frêle,
    Qui se mourait, fanée, à l’angle de deux murs.

    Elle avait fleuri là sans fraîcheur & sans gloire :
    Un peu de rouge à peine égayait sa pâleur,
    Et sa forme indécise, à travers l’ombre noire,
    Reluisait vaguement...

  • Les aspects sont divers de cette morne auberge
    Qu’on nomme l’hôpital. Le vice et la vertu
    Y souffrent à la fois. On met mourir la vierge
    Au lit que, pour mourir, une impure avait eu.

    Martyrs et châtiés sont sur la même ligne,
    Et la fatalité heurte le dévoûment.
    On n’a dans le dortoir qu’un numéro pour signe ;
    L’indifférence à tous fait froid également...

  • Ma pauvre muse, hélas ! qu'as-tu donc ce matin ?
    Tes yeux creux sont peuplés de visions nocturnes,
    Et je vois tour à tour réfléchis sur ton teint
    La folie et l'horreur, froides et taciturnes.

    Le succube verdâtre et le rose lutin
    T'ont-ils versé la peur et l'amour de leurs urnes ?
    Le cauchemar, d'un poing despotique et mutin,
    T'a-t-il noyée au fond d'un...

  • Apologue

    Las des fleurs, épuisé de ses longues amours,
    Un papillon dans sa vieillesse
    (Il avait du printemps goûté les plus beaux jours)
    Voyait d'un oeil chagrin la tendre hardiesse
    Des amants nouveau-nés, dont le rapide essor
    Effleurait les boutons qu'humectait la rosée.
    Soulevant un matin le débile ressort
    De son aile à demi-brisée :
    ...

  • Ma Mignonne
    Je vous donne
    Le bon jour.
    Le sejour
    C'est prison :
    Guerison
    Recouvrez,
    Puis ouvrez
    Vostre porte,
    Et qu'on sorte
    Vistement :
    Car Clement
    Le vous mande.
    Va friande
    De ta bouche,
    Qui se couche
    En danger
    Pour manger
    Confitures :
    Si tu dures
    Trop malade,
    Couleur fade
    Tu...

  • Le malade affligé de la palle jaunisse
    Treuve le miel amer, le fievreux tremblotant
    Au fort de son exces va le flot souhaitant.
    Preferant l'appetit à la santé propice :

    Ainsi le fol mondain corrompu en son vice
    De la loy du Seigneur l'amour ne va goustant :
    Il court à son contraire et le salut attend
    Du vipere infernal qui le meine au supplice....

  • Qui me peut réjouir puisque tu gis malade ?
    Mon départ n'aurait pas engendré ta langueur ?
    Ah ! nenni ! Mais tu feins, pour decevoir mon coeur,
    Ressentir les assauts de la Parque maussade !

    Tu déguises ton teint de cette couleur fade
    Afin de me remplir d'alarmes et de peur,
    Cuidant que mon esprit de mille ennuis vainqueur
    N'ait jamais éprouvé d'...