Je suis étendu dans la boue,
Incapable de faire un pas ;
Il viendrait la plus lourde roue
Que je ne me bougerais pas.

Contre un poteau mon front s’appuie ;
En haut un homme est empalé.
Mordant mes haillons, une truie
Pousse un grognement désolé.

...

Dernier rameau d’un tronc pourri,
Dernier feuillet d’un vilain livre,
Dernière injure, dernier cri
Que poussera l’univers ivre ;

Toi qui baisseras le rideau,
Dernier acteur du noir théâtre,
Dernier torturé du bourreau,
Dernier enfant de la marâtre ;...

Poet: Jules Forni

Mon âme vers ton front où rêve, ô calme sœur,
Un automne jonché de taches de rousseur,
Et vers le ciel errant de ton œil angélique,

Monte, comme dans un jardin mélancolique,
Fidèle, un blanc jet d’eau soupire vers l’Azur !
— Vers l’Azur attendri d’octobre pâle et...

Les petits ifs du cimetière
Frémissent au vent hiémal,
Dans la glaciale lumière.

Avec des bruits sourds qui font mal,
Les croix de bois des tombes neuves
Vibrent sur un ton anormal.

Silencieux comme des fleuves,
Mais gros de pleurs comme eux de flots,...

J’ai traversé deux fois le pays de Rembrandt,
Pays de matelots — qui flotte et qui navigue, —
Où le fier Océan gémit contre la digue,
Où le Rhin dispersé n’est plus même un torrent.

La prairie est touffue et l’horizon est grand ;
Le Créateur ici fut comme ailleurs...

Comme un poison subtil redoutons la pensée.
Moi, si j’avais vingt fils, ils auraient vingt chevaux
Qui, sous les grands soleils ou la bise glacée,

Les emportant joyeux, et par monts et par vaux,
Devanceraient la flèche et l’oiseau dans leurs courses :
Ils n’...

La pierre était triste, en songeant au chêne
Qui libre et puissant croît au grand soleil,
Du haut des rochers regarde la plaine,
Et frissonne et rit quand l’air est vermeil.

Le chêne était triste, en songeant aux bêtes
Qu’il voyait courir sous l’ombre des bois,...

Poet: Jean Lahor

Le soleil, sur le sable, ô lutteuse endormie,
Pour l’or de tes cheveux chauffe un bain langoureux,
Et, consumant l’encens sur ta joue ennemie,
Il mêle avec les pleurs un breuvage amoureux.

De ce blanc Flamboiement l’immuable accalmie
T’a fait dire, attristée, ô mes...

Un fou disait : Venez, ce soir
Le vent souffle, le ciel est noir…
Dieu, dans sa grandeur, est sans voiles.
Aux sons du fifre de l’hiver
Et des flots sonnants de la mer,
Venez voir danser les étoiles.

J’ai l’âme d’or, le cœur d’argent,
Mais l’habit d’un...

Oui, certes, la matière était splendide et pure
Dans laquelle les doigts de la grande Nature
Ont avec tant d’amour ciselé sa beauté ;
Et rien n’est glorieux comme cette fierté
Tranquille, dont l’ampleur souple et majestueuse
Revêt nonchalamment sa grâce fastueuse....