• Je sens déjà saillir de toute fosse obscure
    Mille fiers animaux goulûment animés
    Qui à me dévorer mettront toute leur cure
    Quand mes esprits vitaux se verront consumés,
    Et pour honnêtement dresser ma sépulture,
    D'un loup m'entomberont les boyaux affamés,
    Ni ne veux ciseler le marbre ou le porphyre
    Car mon corps pour tombeau méritait encor pire !
    ...

  • J'aime si hautement que je n'ose nommer
    La divine beauté reine de mon courage,
    De peur que le vulgaire ignorant et volage
    De ma témérité ne vienne me blâmer.

    Si veux-je toutefois plutôt me consumer,
    Aimant une déesse en peine et en servage,
    Et souffrir maint ennui, mainte mort, mainte rage,
    Qu'être content de peu et bassement aimer.

    Que...

  • Renais, renais encor, Méduse monstrueuse,
    Et transforme en rocher par ton hideux regard
    Ce mien corps transpercé de maint amoureux dard,
    Comme sous forme humaine une mort outrageuse,

    Et mon esprit quittant sa prison douloureuse,
    Dont le destin voudra l'affranchir, mais trop tard,
    Après ce Purgatoire où ce beau Soleil l'ard,
    Ait un antre obscurci pour...

  • C'était au jour piteux que la troupe sacrée
    Des morts en Jésus-Christ avait trêve et repos,
    Gisant sous la froideur du cercueil en dépôt,
    Quand de maint Requiem leur âme est honorée.

    Lors au dur souvenir de la seconde année
    Que mon coeur est défunt, pour s'être vu forclos
    D'un oeil en qui le ciel a mon destin enclos,
    Je formais tels sanglots d'une...

  • Que me sert de verser deux ruisseaux de mes yeux,
    Si je ne puis caver le roc de son courage ?
    Hélas, je connais bien qu'en la fleur de mon âge
    Il faut que je m'en aille aux palus stygieux.

    Ô malheureux amour qui me rends furieux,
    Ensorcelant mes sens de ta mortelle rage,
    Pourquoi dessous le joug d'une beauté volage
    Asservis-tu mon coeur dolent et...

  • Tous ces oiseaux qui sous la nuit obscure
    D'un triste vol se plaignent lentement
    Ne sont témoins du doux commencement
    De mon amour sainte, loyale et pure.

    Les clairs ruisseaux, les bois et la verdure
    Des prés fleuris d'un beau bigarrement
    Sont seuls témoins du bien et du tourment
    Que pour aimer également j'endure.

    La nuit n'eût su dans...

  • Vous rochers orgueilleux, et vous forêts fidèles
    Que je fais retentir de mes chants languissants,
    Antres qui répondez à mes tristes accents,
    Quand vous oyez le son de mes plaintes mortelles,

    Vous monts démesurés, et vous campagnes belles,
    Vous ombrages secrets, vous beaux prés verdissants,
    Vous déserts écartés, vous tertres verdissants,
    Qui êtes sûrs...

  • Qui veut voir ici-bas un Astre reluisant,
    Et s'égayer au joug d'une douce misère,
    Voye mon beau Phénix, la réserve plus chère
    Qu'eut de mille ans le Ciel, qu'il nous offre à présent.

    Ce sacré saint oiseau, ce Phénix tout plaisant
    Qui par sa grand douceur adoucirait Mégère,
    Qui souplement volant, d'une voix présagère,
    M'annonce le malheur qui me va...

  • Par le milieu des déserts écartés,
    Dans la frayeur des antres plus sauvages,
    Et sur le bord des plus lointains rivages,
    Je fuis les lieux des hommes habités,

    Et regrettant tes divines beautés,
    Seul à l'écart, j'écoute les ramages
    Des oiselets qui en mille langages
    Chantent d'amour les saintes déités.

    Mais las, maîtresse, ô triste destinée...

  • Hélas ! mes tristes yeux sont changés en fontaines,
    Qui versent non de pleurs mais de larmes de sang,
    Et le trait dont Amour me transperça le sang
    Augmente incessamment mes angoisseuses peines.

    Toujours l'objet hideux de cent morts inhumaines
    Se présente à mes yeux, et la Parque à son rang
    Epouvante mon coeur, ne voyant point le blanc
    A qui...