• *

    Je t’avais revêtu des splendeurs de mon âme,
    Ton corps incomparable était un mannequin,
    Mes désirs étaient l’or masquant un faux sequin,
    Et le dieu n’était dieu que par l’épithalame !

    Les rubis de mon sang, la pourpre de ma flamme
    D’un reflet somptueux baisaient ton front mesquin.
    Tel l’océan...

  •                                        I

    Je t’aime et ne sais ce que je te voudrais.
    Hier mes jambes douces et claires ont tremblé
    quand ma gorge t’a touché, lorsque je courais.

                                           II

    Moi, le sang a coulé plus fort comme une roue,
    jusqu’à ma gorge, en sentant tes bras ronds et doux
    luire à travers ta robe comme...

  •  
    Je t'aime. Il est des jours, il est des jours sacrés
            Où l'âme sent tout bas renaître
    La mémoire des morts qu'on a trop peu pleurés
            Et qu'on fit trop pleurer peut-être.
    Allons sur les tombeaux de nos parents perdus
            Réparer cet ancien outrage.
    On ne donne aux vieillards les pleurs qui leur sont dus
            Que le jour où l...

  • Ie t'ai promis au soir, que pour ce iour
    Ie m’en irois a ton instance grande
    Faire chez toy quelque peu de seiour :
    Mais ie ne puis : parquoy me recommande,
    Te promectant m’acquicter pour l’amande,
    Non d’vn seul iour, mais de toute ma vie,
    Ayant tousiours de te complaire enuie.
    Donc te supply accepter le vouloir,
    De qui tu as la pensee rauie...

  • Je vis Aldebaran dans les cieux. Je lui dis :

    — Ô toi qui luis ! Ô toi qui des clairs paradis
    Ou des hideux enfers portes la torche énorme,
    Toi seul connais ta loi, je ne vois que ta forme ;
    Car d'une énigme à l'autre on ne peut traverser.
    Tout est sphinx ; quand on voit la comète passer
    Farouche, et sans qu'aucun firmament l'ose exclure,
    Sait-on ce...

  •  
    Je vivais sans cœur, tu vivais sans flamme,
    Incomplets, mais faits pour un sort plus beau ;
    Tu pris de mes sens, je pris de ton âme,
    Et tous deux ainsi nous nous partageâme :
    Mais c’est toi qui fis le meilleur cadeau !

    Oui ! c’est toi, merci… C’est toi, sainte femme,
    Qui m’as fait sentir le profond amour…
    Je mis de ma nuit dans ta blancheur d’...

  • Je voudrais bien être vent quelquefois
    Pour me jouer aux cheveux d’Uranie,
    Puis être poudre aussitôt je voudrais,
    Quand elle tombe en sa gorge polie.

    Soudain encor je me souhaiterais
    Pouvoir changer en cette toile unie
    Qui va couvrant ce beau corps que je dois
    Nommer ma mort aussitôt que ma vie.

    Ces changements plairaient à mon désir,
    ...

  • Je vous aimais : vous me l’aviez permis ;
    J’espérais d’être aimé : vous me l’aviez promis.
    Mais, hélas ! belle Iris, je vois bien le contraire ;
    Je n’ose en murmurer
    De peur de vous déplaire ;
    Mais il m’est permis d’expirer,
    S’il m’est ordonné de me taire.

    Dedans vos fers, charmé de vos appas,
    Je souffrais mes tourments et ne m’en plaignais pas...

  • Je vous offre ces vers qu’Amour m'a fait écrire,
    De vos yeux ses flambeaux ardemment agité,
    Non pour sacrer ma peine à l'immortalité :
    Car à si haut loyer ma jeunesse n'aspire.

    C'est le but de mes vœux, que je vous fasse lire
    Le variable état de ma captivité,
    Célébrant vos honneurs si je suis bien traité,
    Accusant vos rigueurs si je sens du martyre...

  •  
    Les blancs fuyaient, les bleus mitraillaient la clairière.

    Un coteau dominait cette plaine, et derrière
    Le monticule nu, sans arbre et sans gazon,
    Les farouches forêts emplissaient l'horizon.

    En arrière du tertre, abri sûr, rempart sombre,
    Les blancs se ralliaient, comptant leur petit nombre,
    Et Jean Chouan parut, ses longs cheveux au vent....