• Noble soldat mutilé par la gloire,
    Dernier débris d’un temple dévasté,
    Tes ennemis, surpris de leur victoire,
    Restent tremblants devant ta pauvreté.
    Cent coups gagnés sur vingt champs de bataille
    T’ont fait pourtant un assez beau trésor ;
    Comme un drapeau criblé par la mitraille,
    Pauvre invalide, ils te craignent encor !

    Ils t’ont connu dans...

  • « Voulez-vous de l’eau ?
    — Non. Je suis au régime.

    Tous les matins, d’un ton impératif,
    La Soif me dit : « Viens, mon petit bonhomme,
    Viens avec moi prendre l’apéritif »,
    Et moi j’y vais, tant je suis faible, en somme.

    En général j’ai la gueule de bois,
    Étant toujours un peu « bu » de la veille...

  •  
    O fils du Mincius, je te salue, ô toi
    Par qui le dieu des arts fut roi du peuple-roi !
    Et vous, à qui jadis, pour créer l’harmonie,
    L’Attique et l’onde Égée, et la belle Ionie,
    Donnèrent un ciel pur, les plaisirs, la beauté,
    Des mœurs simples, des lois, la paix, la liberté,
    Un langage sonore aux douceurs souveraines,
    Le plus beau qui soit né...

  •  
    Couverte de drapeaux et de vertes guirlandes,
    Ouvrant aux brises d’août ses voiles toutes grandes,
    La flotte de Rollo ― Québec s’était livré ―
    Remontait le courant du grand fleuve éploré,
    Cinglant vers Montréal rongé par la famine.

    Suivant d’un œil rougi l’escadre qui chemine
    Dans l’étincellement de l’éther et des eaux,
    Les riverains voyaient...

  •  
     Avec ces traits harmonieux, pareils
           À ceux des Nymphes pures,
     Et ce teint rose et ces anneaux vermeils
           Entre les chevelures,

     Avec les noirs sourcils et les grands cils
           Dont l’ombre solennelle
     Se joue, orgueil de tes regards subtils,
           Sur ta vague prunelle,

     Ta...

  •  
    C’était une amitié simple et pourtant secrète :
    J’avais sur sa parure un fraternel pouvoir,
    Et quand au seuil d’un bal nous nous trouvions le soir,
    J’aimais à l’arrêter devant moi tout prête.

    Elle abattait sa jupe en renversant la tête,
    Et consultait mes yeux comme un dernier miroir,
    Puis elle me glissait un furtif : « Au revoir ! »
    Et belle,...

  • Mignonne, voici le juin.
    Il fait une chaleur folle
    À griller un Bédouin,
    À fondre le Protocole.

    C’est le moment de sottir
    Et d’aller à la campagne
    Au lieu d’icigo rôtir.
    Viens, qui m’aime m’accompagne.

    Si tu veux, soyons hideux :
    Mets ton habit de cycliste
    Équivoque et hasardeux...

  • O lune, ô belle nuit, sérénité profonde,
    Ruissellement du ciel étoilé sur le monde,
    Quiétude des champs où flottent des pâleurs
    Sur la verdure unie et sur l’émail des fleurs,
    Mystère des grands bois, pleins d’ombres illusoires,
    Avec leurs blancs rayons coupés de branches noires,
    Douceur dont l’univers immobile est rempli,
    Fous, solitude, et vous,...

  •  
    Sylphe à la voix si pure, harmonieux génie,
    O toi qui dans mon cœur
    Murmures des accords d'une grâce infinie,
    Des chants pleins de douceur ;

    Des chants qui dans mon âme endorment la tempête,
    Puissants comme autrefois,
    Sur le cœur de Saül la harpe du prophète
    Et le son de sa voix.

    Toi qui vins si souvent aux jours de la souffrance
    ...

  •  
    O Nature, mère immortelle,
    Dieu vivant parmi les dieux morts,
    Consolatrice des remords !

    Nature, ta puissance est telle
    Que, par toi, chantent les douleurs
    Et les tombeaux portent des fleurs ;

    En toi vit la beauté des mondes,
    La pitié des cieux éternels,
    L’amour des êtres fraternels !

    Silence des forêts profondes,
    Voix des...