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    Sous un abri grossier que le charbon enfume,
    Dans un recoin rougi d’une chaude lueur,
    La manche retroussée et le front en sueur,
    Le vaillant forgeron frappe sur son enclume.

    Comme le fer qu’il bat, solide est son grand cœur
    Que n’amollit jamais la peur ou l’amertume.
    Devant l’objet qui naît de son effort vainqueur,
    Au feu de la fierté souvent...

  • Rhythmé par le marteau sonore,
    Le chant joyeux des forgerons
    S'envole à grand bruit vers l'aurore,
    Plus fier que la voix des clairons.

    Jean et Jacques
    La forge mugissante allume
    Nos fronts par la bise mordus,
    Et son reflet parmi la brume
    Chasse les corbeaux éperdus.

    De la Noël au jour de Pâques,
    Nuit et jour, c'est comme un...

  • C’est le grand silence des nuits
    Auquel, seul, le vent s’amalgame.
    Pleurant ses amoureux ennuis,
    Pas une chouette qui clame !
    Rien ! pas même un crapaud n’entame
    Ce figement de tous les bruits.
    Une forme d’homme ou de femme,
    Tout le corps et les traits enfouis
    Dans du noir, suit au long des buis
    La rivière qui sent le drame.
    Ses pas...

  • Ainsi que le disait notre François premier :
    « Souvent femme avarie »
    Il en sut quelque chose, étant fort coutumier
    De la galanterie.

    Il fut donc affligé de ce mal dont Brieux
    ...

  •  
    Vous aviez l’âge où flotte encore
    La double natte sur le dos,
    Mais où l’enfant qu’elle décore
    Sent le prix de pareils fardeaux ;

    L’âge où l’œil déjà nous évite,
    Quand, sous des vêtements moins courts,
    Devant sa mère, droit et vite,
    On va tous les matins au cours ;

    Où déjà l’on pince les lèvres
    Au tutoiement d’un grand garçon,...

  • VI

    Ils sont les chiens de garde énormes de Paris.
    Comme nous pouvons être à chaque instant surpris,
    Comme une horde est là, comme l'embûche vile
    Parfois rampe jusqu'à l'enceinte de la ville,
    Ils sont dix-neuf épars sur les monts, qui, le soir,
    Inquiets, menaçants, guettent l'espace noir,
    Et, s'entr'avertissant dès que la...

  • Le fossoyeur-bedeau
    Se fait toujours attendre…
    Les porteurs vont reprendre
    Leur funèbre fardeau.

    En soufflant ses grands cierges
    L’officiant se dit :
    « Mon sacristain maudit
    Court encor les auberges ! »

    Enfin, on s’achemine
    Au cimetière, et là
    Riant tout fort, voilà
    Chacun changeant sa mine.

    Car, une voix sereine,...

  • Là-bas,
    Dans le jardin des ifs et des trépas,
    Depuis toujours, un homme bêche
    La terre sèche.

    Autour de lui, quelques saules se survivant
    Pleurent — et quelques fleurs navrées
    D’être éternellement, par la pluie et le vent
    Et la tempête, chavirées.

    Le sol, il n’est que trous et bosses ;
    Aux quatre coins, bâillent des...

  • Que je sois un fou, qu’on le dise,
    Je trouve ça tout naturel,
    Ayant eu ma part de bêtise
    Et commis plus d’une sottise,
    Depuis que je suis… temporel.

    Je suis un fou, quel avantage,
    Madame ! un fou, songez-y bien,
    Peut crier… se tromper d’étage,
    Vous proposer… le mariage,
    On ne lui dira jamais rien,

    C’est un fou ; mais lui peut tout...

  •  
    C’est un fou, c’est un fou que nul ne peut guérir.
    Tout enfant, il passait de longs jours à courir
    Dans les prés, dans les bois, au bord des précipices.
    La solitude a fait en lui germer des vices,
    Et dans les chants du nid, dans les souffles du vent,
    Dans les cris de la foudre et du gouffre mouvant,
    Dans les feux du soleil, dans l’ombre des...