• J’ai vu ses yeux perçants, j’ai vu sa face claire :
    (Nul jamais sans son dam ne regarde les dieux)
    Froid, sans cœur me laissa son œil victorieux,
    Tout étourdi du coup de sa forte lumière.

    Comme un surpris de nuit aux champs quand il éclaire,
    Étonné, se pâlit si la flèche des cieux
    Sifflant lui passe contre, et lui serre les yeux :
    ...

  • C'est amour, c'est amour, c'est lui seul, je le sens,
    Mais le plus vif amour, la poison la plus forte.
    À qui onc pauvre cœur ait ouverte la porte  :
    Ce cruel n'a pas mis un de ses traits perçants,

    Mais arc, traits et carquois, et lui tout dans mes sens.
    Encore un mois n'a pas, que ma franchise est morte,
    Que ce venin mortel dans mes...

  • Je vois bien, ma Dordogne encore humble tu vas :
    De te montrer Gasconne en France, tu as honte.
    Si du ruisseau de Sorgue, on fait ores grand conte,
    Si a-t-il bien été quelquefois aussi bas.

    Vois-tu le petit Loir comme il hâte le pas ?
    Comme déjà parmi les plus grands il se compte ?
    Comme il marche hautain d’une course plus prompte
    ...

  • J’étais près d’encourir pour jamais quelque blâme.
    De colère échauffé mon courage brûlait,
    Ma folle voix au gré de ma fureur branlait,
    Je dépitais les dieux, et encore ma dame.

    Lorsqu’elle de loin jette un brevet dans ma flamme
    Je le sentis soudain comme il me rhabillait,
    Qu’aussitôt devant lui ma fureur s’en allait,
    Qu’il me...

  • Je tremblais devant elle, et attendais, transi,
    Pour venger mon forfait quelque juste sentence,
    À moi-même con(sci)ent du poids de mon offense,
    Lorsqu’elle me dit, va, je te prends à merci.

    Que mon los désormais partout soit éclairci :
    Employe là tes ans : et sans plus mes-huy pense
    D’enrichir de mon nom par tes vers notre France,
    ...

  • Si ma raison en moi s’est pu remettre,
    Si recouvrer asteure je me puis,
    Si j’ai du sens, si plus homme je suis,
    Je t’en mercie, ô bienheureuse lettre.

    Qui m’eût (hélas) qui m’eût su reconnaître
    Lorsqu’enragé vaincu de mes ennuis,
    En blasphémant ma dame je poursuis ?
    De loin, honteux, je te vis lors paraître

    Ô saint papier,...

  • Quoi ? qu’est-ce ? ô vents, ô nues, ô l’orage !
    À point nommé, quand d’elle m’approchant
    Les bois, les monts, les baisses vois tranchant
    Sur moi d’aguet vous poussez votre rage.

    Ores mon cœur s’embrase davantage.
    Allez, allez faire peur au marchand,
    Qui dans la mer les trésors va cherchant :
    Ce n’est ainsi, qu’on m’abat le courage...

  • Quand viendra ce jour là, que ton nom au vrai passe
    Par France, dans mes vers ? Combien et quantes fois
    S’en empresse mon cœur, s’en démangent mes doigts ?
    Souvent dans mes écrits de soi-même il prend place.

    Malgré moi je t’écris, malgré moi je t’efface.
    Quand Astrée viendrait et la foi et le droit,
    Alors joyeux ton nom au monde se...

  • Ô entre tes beautés, que ta constance est belle.
    C’est ce cœur assuré, ce courage constant,
    C’est parmi tes vertus, ce que l’on prise tant :
    Aussi qu’est-il plus beau, qu’une amitié fidèle ?

    Or ne charge donc rien de ta sœur infidèle,
    De Vézère ta sœur : elle va s’écartant
    Toujours flottant mal sûre en son cours inconstant.
    Vois-tu...

  • Toi qui oys mes soupirs, ne me sois rigoureux
    Si mes larmes à part toutes miennes je verse,
    Si mon amour ne suit en sa douleur diverse
    Du Florentin transi les regrets langoureux,

    Ni de Catulle aussi, le folâtre amoureux,
    Qui le cœur de sa dame en chatouillant lui perce,
    Ni le savant amour du demi-Grec Properce,
    Ils n’aiment pas...