•  

    I

    Le printemps, couronné de folles marjolaines,
    Sur la pointe des monts a mis son pied léger ;
    Une flûte à la main, comme un jeune berger,
    Du pays de l’azur il descend vers les plaines.

    Quelque musique flotte à l’horizon lointain,
    Pareille à l’oiseau bleu qui jamais ne se pose,
    Et la colline d’or se perd dans le ciel...

  •  
    Pris en remuements dans les glaces, dans l’accalmie des mers dorment
    Les squelettes muets des navires morts.
    Le vent à vol rapide qui toucha leurs voiles
    Et, en effroi, s’est enfui ! bondit aux cieux —
    Bondit ! et n’ose pas de son haleine battre la terre,
    Pour n’avoir vu partout que la pâleur, le gel, et la mort !…
    Comme des sarcophages, les glaces à...

  •  
                I. Sonnet irrégulier


                No, Time, thou shalt not boast that I do change.
                Shakespeare, sonnet CXXIII

            O temps ! ô conquérant ! te voici vaincu, toi
            L’invincible, toi qui gardes un front tranquille !
            Tu te vantes que tout change. Certes. Mais moi
            Pourtant,...

  • Vous m’avez demandé quelques vers sur « Amour ».
    Ce mien livre, d’émoi cruel et de détresse,
    Déjà loin dans mon Œuvre étrange qui se presse
    Et dévale, flot plus amer de jour en jour.
     
    Qu’en dire, sinon : « Poor Yorick ! » ou mieux « poor
    Lelian ! » et pauvre âme à tout faire, faiblesse,
    Mollesse par des fois et caresse et paresse,
    Ou tout à coup...

  • Quelques louanges nonpareiIles
    Qu'ait Apelle encor aujourd'hui,
    Cet ouvrage plein de merveilles
    Met Rabel au-dessus de lui.

    L'art y surmonte la nature,
    Et si mon jugement n'est vain,
    Flore lui conduisait la main
    Quand il faisait cette peinture.

    Certes il a privé mes yeux
    De l'objet qu'ils aiment le mieux,
    N'y mettant point de...

  • On y revient ; il faut y revenir moi-même.
    Ce qu'on attaque en moi, c'est mon temps, et je l'aime.
    Certe, on me laisserait en paix, passant obscur,
    Si je ne contenais, atome de l'azur,
    Un peu du grand rayon dont notre époque est faite.

    Hier le citoyen, aujourd'hui le poète ;
    Le "romantique" après le "libéral". -- Allons,
    Soit ; dans mes deux...

  • Été : être pour quelques jours
    le contemporain des roses ;
    respirer ce qui flotte autour
    de leurs âmes écloses.

    Faire de chacune qui se meurt
    une confidente,
    et survivre à cette soeur
    en d'autres roses absente.

  • D'où vient cela que l'envieuse rage,
    Qui les coeurs ronge, entreprend de blâmer
    Mes ans oisifs, et les vers un ouvrage
    D'un pauvre esprit et paresseux nommer,

    En m'accusant que je ne suis la trace,
    Étant dispos, de mes nobles aïeux,
    Qui ont conquis par la poudreuse place
    Et par le sang maint loyer vertueux ?

    Ou bien pourquoi me reprend-elle d...