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    La mauvaise pensée arrive dans mon âme
    En tous lieux, à toute heure, au fort de mes travaux,
    Et j’ai beau m’épurer dans un rigoureux blâme
    Pour tout ce que le Mal insuffle à nos cerveaux,
    La mauvaise pensée arrive dans mon âme.

    J’écoute malgré moi les notes infernales
    Qui vibrent dans mon cœur où Satan vient cogner ;
    Et bien que j’aie horreur...

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    Farai un vers de dreit nien
    Non er de mi ni d'autra gen
    Non er d'amor ni de joven
    Ni de ren au
    Qu'enans fo trobatz en durmen
    Sus un chivau

    No sai en qual hora.m fui natz
    No soi alegres ni iratz
    No soi estranhs ni soi privatz
    Ni no.n puesc au
    Qu'enaisi fui de nueitz fadatz
    Sobr'un pueg au

    No sai cora.m fui...

  • Quand je n’ai rien à faire, et qu’à peine un nuage
    Dans les champs bleus du ciel, flocon de laine, nage,
    J’aime à m’écouter vivre, et, libre de soucis,
    Loin des chemins poudreux, à demeurer assis
    Sur un moelleux tapis de fougère et de mousse,
    Au bord des bois touffus où la chaleur s’émousse.
    Là, pour tuer le temps, j’observe la fourmi
    Qui, pensant au...

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    Que n’ai-je appris l’amour sous un regard moins beau !
    Je n’aurais pas traîné si longtemps sur la terre
    Cet âpre souvenir, le seul que rien n’altère,
    Et qui, le plus lointain, me soit toujours nouveau.

    Hélas ! je ne peux pas souffler comme un flambeau
    L’œil bleu, pâle qui luit dans mon cœur solitaire ;
    On ne se remplit pas d’unenuit volontaire,...

  • L’épée en main, le pied sur la roue immortelle,
    Douce à l’homme futur, terrible au dieu dompté,
    Elle vole, les yeux dardés droit devant elle,
    Dans sa grâce, sa force et sa sérénité !

  • Je suis jeune ; la pourpre en mes veines abonde ;
    Mes cheveux sont de jais et mes regards de feu,
    Et, sans gravier ni toux, ma poitrine profonde
    Aspire à pleins poumons l’air du ciel, l’air de Dieu.

    Aux vents capricieux qui soufflent de Bohême,
    Sans les compter, je jette et mes nuits et mes jours,
    Et, parmi les flacons, souvent l’aube au teint blême
    ...

  • Ses lèvres ont ravagé les grappes meurtries
    Et bu le baiser rouge et cruel du Désir.
    Elle ne connaît point les blanches rêveries,
    Ni l’amour que les bras ne sauraient point saisir.

    Ses regards ont fané la volupté des lignes,
    Les roses de...

  • Humblement, tendrement, sur le tombeau charmant
              Sur l’insensible monument,
    Que d’ombres, d’abandons, et d’amour prodiguée,
    Forme ta grâce fatiguée,
    Je meurs, je meurs sur toi, je tombe et je m’abats,

    Mais à peine abattu sur le sépulcre bas,
    Dont la close étendue aux cendres me convie,
    Cette morte apparente, en qui revient...

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    Pourquoi donc, matrônes austères,
    Vous alarmer de mes accens ?
    Vous, jeunes filles trop sévères,
    Pourquoi redoutez-vous mes chants ?
    Ai-je peint les enlèvemens,
    Des passions les noirs ravages,
    Et ces impétueux orages
    Qui naissent aux coeurs des amans ?
    Je célèbre des jeux paisibles,
    Qu’envain on semble mépriser,
    Les vrais bien...