• S’il est au monde une beauté
    qui de Corneille ait hérité,
    vous possédez cet apanage.
    L’enfant dont je me suis chargé
    n’a point l’art des vers en partage ;
    vous l’avez : c’est un avantage
    qui m’a quelquefois affligé,
    et que doit fuir tout homme sage.
    Ce dangereux et beau talent
    est pour vous un simple ornement,
    un pompon de plus à...

  • Illustre protecteur des perdrix de Mont-Rouge,
    des faucons, des auteurs, et surtout des catins ;
    vous dont l’auguste sceptre au cuir blanc, au bout rouge,
    est l’effroi des cocus et l’amour des putains,
    vous daignez vous servir de votre aimable plume
    pour dire à la postérité
    que vous avez aimé certain suisse effronté,
    très-indiscret auteur de plus d’un...

  • Le sublime en tout genre est le don le plus rare ;
    c’est là le vrai phénix ; et, sagement avare,
    la nature a prévu qu’en nos faibles esprits
    le beau, s’il est commun, doit perdre de son prix.
    La médiocrité couvre la terre entière ;
    les mortels ont à peine une faible lumière,
    quelques vertus sans force, et des talents bornés.
    S’il est quelques esprits...

  • Intrépide soldat, vrai chevalier, grand homme,
    bon roi, fidèle ami, tendre et loyal amant,
    toi que l’Europe a plaint d’avoir fléchi sous Rome,
    sans qu’on osât blâmer ce triste abaissement,
    Henri, tous les français adorent ta mémoire :
    ton nom devient plus cher et plus grand chaque jour ;
    et peut-être autrefois quand j’ai chanté ta gloire
    je n’ai point...

  • Croyez qu’un vieillard cacochyme,
    chargé de soixante et douze ans,
    doit mettre, s’il a quelque sens,
    son âme et son corps au régime.
    Dieu fit la douce illusion
    pour les heureux fous du bel âge ;
    pour les vieux fous l’ambition,
    et la retraite pour le sage.
    Vous me direz qu’Anacréon,
    que Chaulieu même, et Saint-Aulaire,
    tiraient encor...

  • Si vous brillez à votre aurore,
    quand je m’éteins à mon couchant ;
    si dans votre fertile champ
    tant de fleurs s’empressent d’éclore,
    lorsque mon terrain languissant
    est dégarni des dons de Flore ;
    si votre voix jeune et sonore
    prélude d’un ton si touchant,
    quand je fredonne à peine encore
    les restes d’un lugubre chant ;
    si des graces...

  • Aimable amant de Polymnie,
    jouissez de cet âge heureux
    des voluptés et du génie ;
    abandonnez-vous à leurs feux :
    ceux de mon âme appesantie
    ne sont qu’une cendre amortie,
    et je renonce à tous vos jeux.
    La fleur de la saison passée
    par d’autres fleurs est remplacée.
    Une sultane avec dépit,
    dans le vieux sérail délaissée,
    voit la...

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    Quien baga aplicaciones
    Con su pan se lo coma.
    (YRIARTE.)

    Brutus, te souvient-il, dis-moi,
    Du temps où, las de ta livrée,
    Tu vins, en veste déchirée,
    Te joindre à ce bon peuple-roi
    Fier de sa majesté sacrée
    Et formé de gueux comme toi ?
    Dans ce beau temps de république,
    Boire et jurer fut ton emploi ;
    ...

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    Si tu peux te résoudre à quitter ton logis,
    Où l’or et l’outremer brillent sur les lambris,
    Et laisser cette table avec ordre servie,
    Viens, pourvu que l’amour ailleurs ne te convie,
    Prendre un repas chez moi, demain, dernier janvier,
    Dont le seul appétit sera le cuisinier.
    Je te garde avec soin, mieux que mon patrimoine,
    D’un vin exquis,...

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    Ministre financier, que la France révère,
    Que les heureux aînés ont appelé leur père,
    Et qui, sachant que l’or pourrait nous pervertir,
    Cherche de tous côtés des gens à convertir ;
    Permets qu’émerveillé de tes talens sublimes,
    Un enfant d’Apollon t’adresse quelques rimes.
    Des Muses, il est vrai, tu ne fais pas grand cas,
    Et la double colline a...