• Déjà plus d’une feuille sèche
    Parsème les gazons jaunis ;
    Soir et matin, la brise est fraîche :
    Hélas ! les beaux jours sont finis !

    On voit s’ouvrir les fleurs que garde
    Le jardin, pour dernier trésor :
    Le dahlia met sa cocarde,
    Et le souci sa toque d’or.

    La pluie au bassin fait des bulles ;
    Les hirondelles sur le toit
    Tiennent...

  •  
    D’attraits ravissants pourvue,
    Seule, elle réunit tout ;
    Ses appas charment la vue,
    Et chacun vante son goût.
    Sa peau, veloutée et fraîche,
    Joint toujours la rose au lis :
    Ce pourrait être Phyllis,
    Si ce n’était une pêche.

    V. D’AUVERNEY.

    [Le Conservateur littéraire, 17 juin 1820.]

  •  
    Ce que je veux, sur le coteau,
    C'est, lorsque Mai vient nous sourire,
    Une cabane qui se mire
    Dans le miroir clair d'un ruisseau ;

    C'est un nid perdu sous les branches,
    Ou ne conduise aucun chemin,
    Un nid qui n'ait d'autre voisin
    Que le nid des colombes blanches.

    Ce que je veux, à l'horizon,
    C'est, au pied d'une roche grise,
    ...

  •  
    Vers accompagnant l’envoi d’un portrait.

    Voilà votre portrait. C’est votre grâce altière,
    C’est votre beauté grecque, en la pâle lumière
    Filtrée à travers l’or d’un vieux vitrail flamand ;
    De longs et chauds rayons caressent doucement
    Votre lèvre entr’ouverte où flotte la parole,
    Et font de vos cheveux une blonde auréole ;
    L’...

  •  
    Le présent se fait vide et triste,
    Ô mon amie, autour de nous ;
    Combien peu de passé subsiste !
    Et ceux qui restent changent tous.

    Nous ne voyons plus sans envie
    Les yeux de vingt ans resplendir,
    Et combien sont déjà sans vie
    Des yeux qui nous ont vus grandir !

    Que de jeunesse emporte l’heure,
    Qui n’en rapporte jamais rien !...

  • XIX

    Enfants, beaux fronts naïfs penchés autour de moi,
    Bouches aux dents d’émail disant toujours : Pourquoi ?
    Vous qui, m’interrogeant sur plus d’un grand problème,
    Voulez de chaque chose, obscure pour moi-même,
    Connaître le vrai sens...

  • Ce qui semble perir se change seulement
    L’Esté est il passé ? l’an suivant le rameine
    Voit on noircir la nuit ? la lumiere prochaine
    Redore incontinant l’azur du firmament :

    Le rayonnant Soleil d’un pareil mouvement
    Par l’escharpe du ciel tous les jours se promeine
    Et suivant du Seigneur l’Ordonnance certaine
    Tout remonte à son tour, & tombe...

  • I

    Ainsi, toujours, vers l’azur noir
    Où tremble la mer des topazes,
    Fonctionneront dans ton soir
    Les Lys, ces clystères d’extases !

    À notre époque de sagous,
    Quand les Plantes sont travailleuses,
    Le Lys boira les bleus dégoûts
    Dans tes Proses religieuses !

    − Le lys de monsieur de Kerdrel,
    Le Sonnet de mil huit cent trente,
    Le...

  •  
    O ma belle brune aux yeux bleus,
    Vagabonde enfant des Bohèmes,
    Laisse-moi lire dans tes yeux,
    De ton regard les longs poèmes.

    Derrière le rideau des bois
    Le soleil va cacher son orbe ;
    Assoupis un moment ta voix
    Et les refrains de ton théorbe.

    Et dans l’océan de tes yeux
    Laisse voguer ma fantaisie ;
    Sous les plis de leurs...

  • Ce siècle est grand et fort. Un noble instinct le mène.
    Partout on voit marcher l’idée en mission ;
    Et le bruit du travail, plein de parole humaine,
    Se mêle au bruit divin de la création

    Partout, dans les cités et dans les solitudes,
    L’homme est fidèle au lait dont nous le nourrissions ;
    Et dans l’informe bloc des sombres multitudes
    La pensée en...