Pareil à ces men-hir qu’aiment les clairs de lune,
Lanjuinais est un dur combattant ; la tribune
Tressaille sous son poids impérieux ; Danton
Estime les assauts de ce rude Breton
Et les coups de bélier que lance cette tête ;
La mêlée effrayante est sa vie et sa fête...

Ne me reprochez pas, Mesdames, d’être épris
Du chapeau printanier qu’on porte cette année ;
Car je l’ai vu posé sur des cheveux chéris
Et la tête que j’aime en est gaîment ornée.

La tresse de bluets et de coquelicots,
Qui retombe et se mêle avec la chevelure,...

Elle allait me quitter ; c’était pour très-longtemps.
Oh ! comme le cœur bat dans ces derniers instants.
Les départs du matin font souffrir : on s’éveille
De la nuit plein le cœur, quand l’aurore est vermeille,
Quand l’azur rajeuni devient rose et lilas ;
On a les...

Donnez la même tombe aux deux êtres aimés :
Qu’ils soient dans l’inconnu côte à côte enfermés !
Ramenez, s’il est loin, celui que l’autre pleure.
Un seul amour demande une seule demeure ;
Et c’est une souffrance à torturer un mort,
De ne point reposer au lit où l’...

Fraîches, d’un rose vif et pâle tour à tour,
Les heures du matin sont l’enfance du jour.
Du ciel elles ont vu la ville, leur amie,
Et donnent un baiser à la belle endormie.
Faites de transparence et de virginité,
Nul souffle impur ne touche à leur frêle beauté....

Le meurtrier cosaque avait pour lent supplice
D’être avec la victime enseveli vivant :
— Près Kharkov une vierge aux portes d’un couvent
Fut tuée étant prête à vêtir le cilice.

Sur la bière on a peint dans l’or le blanc calice ;
Le jeune meurtrier pieds nus marche...

Au milieu des joyaux étincelants et lourds
Dont elle allait parer sa gorge demi-nue,
Elle vit un bouquet qu’une main inconnue,
Avait mis là, parmi la soie et le velours.

Or ce bouquet, formé de fleurs presque fanées,
Rien qu’à le voir serrait le cœur ; les...

Comme une vierge au front vermeil
Dans le jardin des cieux venue,
L’Aube, ayant vaincu le sommeil,
Cueille les fruits d’or de la nue.

Dans l’azur, immense verger
Des constellations fécondes,
Elle passe d’un pas léger,
Laissant flotter ses tresses...

Quand l’immémoriale antiquité des jours
Commençait pour ce globe et ses vides séjours,
L’obscure volonté selon qui la matière
Se ruait à remplir sa destinée entière
Faisait sur le désert universel des eaux
Voguer des continents comme de grands vaisseaux ;
Et,...

Sur le grand lit drapé de rideaux de dentelle
Qu’une pale veilleuse éclairait à demi,
Je m’assis en silence, et, m’accoudant près d’elle,
Longtemps je contemplai son visage endormi.

Est-il des cœurs si faux que leur sommeil nous mente ?
— Qui croire alors ? —...

Poet: Paul Bourget