• Lorsque j'étais encore un tout jeune homme pâle,
    Et que j'allais entrer dans la lice fatale,
    Sombre arène où plus d'un avant moi se perdit,
    L'âpre Muse aux regards mystérieux m'a dit :
    — Tu pars ; mais quand le Cid se mettait en campagne
    Pour son Dieu, pour son droit et pour sa chère Espagne,
    Il était bien armé ; ce vaillant Cid avait
    Deux casques,...

  •  
    Oui, les riches aspects et des champs et de l’onde
    D’intéressans tableaux sont la source féconde :
    Oui, toujours je revois avec un plaisir pur
    Dans l’azur de ces lacs briller ce ciel d’azur,
    Ces fleuves s’épancher en nappes transparentes,
    Ces gazons serpenter le long des eaux errantes,
    Se noircir ces forêts et jaunir les moissons,
    En de rians...

  • Venir à la clarté sans force et sans adresse,
    Et n’ayant fait long temps que dormir et manger,
    Souffrir mille rigueurs d’un secours estranger
    Pour quitter l’ignorance en quittant la foiblesse :

    Apres, servir long temps une ingratte Maistresse,
    Qu’on ne peut acquerir, qu’on ne peut obliger ;
    Ou qui d’un naturel inconstant et leger,
    Donne fort peu de...

  •  
    Dans tout l’enivrement d’un orgueil sans mesure,
    Ébloui des lueurs de ton esprit borné,
    Homme, tu m’as crié : « Repose-toi, Nature !
    Ton œuvre est close : je suis né ! »

    Quoi ! lorsqu’elle a l’espace et le...

  •  
    Tout jeune homme aujourd'hui semble un vieillard aride,
    Et le plus jeune front déjà porte sa ride
    Dans ce siècle penseur, tant la réflexion
    Est plus prompte que l'âge à creuser son sillon !
    Avec la foi naïve est morte toute flamme,
    Et la candeur du front avec celle de l'âme.
    De retour parmi nous, peintre du paradis,
    Ne te croirais-tu pas au...

  •  
    Sur un marché rempli d’une rumeur de houle,
    En plein jour, sa lanterne allumée à la main,
    Et semblant à tâtons poursuivre son chemin,
    Diogène cherchait un homme dans la foule.

    Le philosophe grec, sorti de son tonneau,
    Qu’il aimait à l’égal d’un palais de carrare,
    Faisait comprendre ainsi que la droiture est rare,
    Qu’on ne peut la trouver sans...

  • Un jeune homme qui a beaucoup souffert
    traverse la place du hameau vert.
    La chaleur est immense. Il passe devant
    l’auberge et une modeste grille
    où s’entortillent des roses et de la vigne.

    La douce hirondelle poursuit les guêpes
    dans le silence. C’est l’heure des vêpres.

    Il entre doucement, sans être aperçu,
    dans l’église pauvre où les voix...

  • Comme tout ce grand monde a forme circulaire,
    Chaque partie aussi fait un cercle agissant ;
    Chacun des éléments, dedans l'autre passant,
    Se tourne, retournant au repos de sa sphère.

    Le soleil rond se tourne en sa course ordinaire,
    En rond la lune tourne, et forme son croissant ;
    Où chaque ciel commence il devient finissant,
    Ainsi que tous les...

  • Voici que vous avez assez souffert, pauvre homme,
    Assez connu l'amour, le désir, le dégoût,
    L'âpreté du vouloir et la torpeur des sommes,
    L'orgueil d'être vivant et de pleurer debout...

    Que voulez-vous savoir qui soit plus délectable
    Que la douceur des jours que vous avez tenus,
    Quittez le temps, quittez la maison et la table ;
    Vous serez sans...

  • Oh ! me coucher tranquillement
    Pendant des heures infinies !
    Et j'étais pourtant ton amant
    Lors des abandons que tu nies.

    Tu mens trop ! Toute femme ment.
    Jouer avec les ironies,
    Avec l'oubli froid, c'est charmant.
    Moi, je baise tes mains bénies.

    Je me tais. Je vais dans la nuit
    Du cimetière calme où luit
    La lune sur la terre brune...