• Toute ma lampe a brûlé goutte à goutte,
    Mon feu s’éteint avec un dernier bruit.
    Sans un ami, sans un chien qui m’écoute,
    Je pleure seul, dans la profonde nuit.

    Derrière moi ― si je tournais la tête,
    Je le verrais, ― un fantôme est placé :
    Témoin fatal apparu dans ma fête,
    Spectre en lambeaux de mon bonheur passé.

    Mon rêve est mort, sans espoir...

  •  
    Or, ce fut par un soir plein d’un funèbre charme,
    Qu’après avoir suivi des chemins hasardeux
    Ils s’assirent enfin dans un vallon hideux
    Où maint reptile errant commençait son vacarme.

    Et tandis que l’orfraie avec son cri d’alarme
    Clapotait lourdement dans un vol anxieux,
    Sous la compassion sidérale des cieux
    Ils gémirent longtemps sans verser...

  • Par-dessus tous les Dieux du ciel et de la terre
    J’adore ton pouvoir immuable indompté,
    Déesse des vieux jours, morne Fatalité.
    Ce pouvoir implacable, aveugle et solitaire
    Écrase mon orgueil et ma force, et je vois
    Que l’on décline en vain tes inflexibles lois.

    Les peuples adoraient le joug qui les enchaîne,
    Rome dormait en paix sur son char triomphal...

  •  
           Nuit d'étoiles,
           Sous tes voiles,
       Sous ta brise et tes parfums,
           Triste lyre
            Qui soupire,
       Je rêve aux amours défunts.

    La sereine Mélancolie
    Vient éclore au fond de mon cœur,
    Et j'entends l'âme de ma mie
    Tressaillir dans le bois rêveur.

           Nuit d'étoiles,
           Sous tes voiles,...

  •  
    Dans cette mascarade immense des vivants
    Nul ne parle à son gré ni ne marche à sa guise ;
    Faite pour révéler, la parole déguise,
    Et la face n’est plus qu’un masque aux traits savants.

    Mais vient l’heure où le corps, infidèle ministre,
    Ne prête plus son geste à l’âme éparse au loin,
    Et, tombant tout à coup dans un repos sinistre,
    Cesse d’être...


  • ...

  • Car mon cœur, jamais fatigué
    D’être ou du moins de le paraître,
    Quoi qu’il en soit, s’efforce d’être
    Ou de paraître fol et gai.

    Mais, mieux que de chercher fortune
    Il tend, ce cœur, dur comme l’arc
    De l’Amour en plâtre du parc,
    À se détendre en l’autre et l’une

    Et les autres : des cibles qu’on
    Perçoit aux ventres des nuages
    Noirs...

  • Un long silence pend de l’immobile nue.
    La neige, bossuant ses plis amoncelés.
    Linceul rigide, étreint les océans gelés.
    La face de la terre est absolument nue.

    Point de villes, dont l’âge a rompu les étais,
    Qui s’effondrent par blocs confus que mord le lierre.
    Des lieux où tournoyait l’active fourmilière
    Pas un débris qui parle et qui dise : J’étais...

  • Là, peinte au mur, c'est ma dernière duchesse,
    Ne la croirait-on pas vivante ? Cette œuvre
    est une merveille, savez-vous ? Les mains de Frère Pandolf
    se sont affairées une journée entière, et la voici, en pied.
    Vous plairait-il de vous asseoir et de la contempler ?
    J'ai dit « Frère Pandolf » à dessein, car, voyez-vous,
    aucun étranger n'a jamais lu ce visage...

  • Dans cette mascarade immense des vivants
    Nul ne parle à son gré ni ne marche à sa guise ;
    Faite pour révéler, la parole déguise,
    Et la face n'est plus qu'un masque aux traits savants.

    Mais vient l'heure où le corps, infidèle ministre,
    Ne prête plus son geste à l'âme éparse au loin,
    Et, tombant tout à coup dans un repos sinistre,
    Cesse d'être complice et...