• Quand je pense à ma vie un grand ennui me prend,
    Et j’ai pitié de voir ma jeune destinée
    S’effeuiller solitaire, humblement résignée,
    Comme une fleur des eaux qu’emporte le courant.

    Je ne m’en émeus plus ni trop ne m’en étonne,
    Car je sais quels débris roulent les plus purs flots ;
    Et, dans un même accord, quels déchirants sanglots
    Ils mêlent si...

  • L’automne s’enfuit dans la brume rose
    Et laisse l’hiver maître du jardin.
    Dès son premier pas le tyran morose
    Dirige sur tout son souffle assassin.

    Farouche, il attend le sombre cortége
    Des nuits dont les pleurs forment les glaçons ;
    Et, tout en tissant son linceul de neige,
    Sème autour de lui les mortels frissons.

    Les feuilles, pleuvant,...

  • Aux pieds d’un sphinx, gardien d’une âpre sépulture,
    Béante sur le seuil du désert au sol roux,
    Des Arabes pensifs, couchés dans leur burnous,
    Caressent l’yatagan qui brille à leur ceinture.

    Rayonnement du front, fierté de la stature,
    Attestent les aïeux dont ils descendent tous ;
    Moïse et Mahomet sous leur double imposture
    Ont courbé cette race à l’...

  • Les cris des chiens, les voix du cor
    Sonnent dans les bois de Ferrières ;
    L’écho de ces rumeurs guerrières
    Épouvante le frais décor.

    Les habits d’écarlate et d’or
    Resplendissent dans les clairières ;
    Les cris des chiens, les voix du cor
    Sonnent dans les bois de Ferrières.

    Les meutes ont pris leur essor,
    Et le cerf dans les fondrières...

  • La Guerre, ivre de sa colère,
    Embouche ses clairons sonores ;
    Terre, déjà tu te colores
    De ce sang fumant qu’elle flaire.

    L’incendie effrayant l’éclaire,
    Comme de rouges météores ;
    La Guerre, ivre de sa colère,
    Embouche ses clairons sonores.

    Et pour réclamer leur salaire,
    O Dieu ! dans les cieux que tu dores,
    Les vautours, sous l’...

  • Avec ses caprices, la Lune
    Est comme une frivole amante ;
    Elle sourit et se lamente,
    Et vous fuit et vous importune.

    La nuit, suivez-la sur la dune,
    Elle vous raille et vous tourmente ;
    Avec ses caprices, la Lune
    Est comme une frivole amante.

    Et souvent, elle se met une
    Nuée en manière de mante ;
    Elle est absurde, elle est charmante...

  • La Vierge n’est plus folle. Un malaise d’amour
    La tient presque mourante au fond d’une vallée
    Et pèse avec langueur sur sa gorge troublée
    Comme le vent du soir sur un raisin trop lourd.

    Son œil à demi clos veut oublier le jour.
    Vénus mélancolique, à l’ombre d’une allée
    Sous un effort de vie elle tombe accablée,
    Car son cœur était large et le temps...

  • Nous bénissons la douce Nuit,
    Dont le frais baiser nous délivre.
    Sous ses voiles on se sent vivre
    Sans inquiétude et sans bruit.

    Le souci dévorant s’enfuit ;
    Le parfum de l’air nous enivre ;
    Nous bénissons la douce Nuit,
    Dont le frais baiser nous délivre.

    Pâle songeur qu’un Dieu poursuit,
    Repose-toi, ferme ton livre.
    Dans les cieux...

  • La Paix, au milieu des moissons,
    Allaite de beaux enfants nus.
    A l’entour, des chœurs ingénus
    Dansent au doux bruit des chansons.

    Le soleil rit dans les buissons,
    Et sous les vieux arbres chenus
    La Paix, au milieu des moissons,
    Allaite de beaux enfants nus.

    Les fleurs ont de charmants frissons.
    Les travailleurs aux bras charnus,
    ...

  • Nommez votre pays de ce nom : la patrie !
    Après celui de Dieu, c’est le nom du devoir.
    Prononcez-le toujours avec idolâtrie,
    Ce nom qui vous oblige au combat, à l’espoir.

    Si quelqu’un, se disant le citoyen du monde,
    Insulte à votre amour du haut de sa raison,
    Ce mot : l’Humanité, sur sa lèvre inféconde...