Doux pasteur du troupeau des âmes,
Qui conduis aux sources de Dieu
Ces petits enfants et ces femmes
Penchés aux coupes du saint lieu ;
Semeur des célestes paroles,
Qui sèmes la gerbe du Christ,
Ce sénevé des paraboles,
Dont le grain lève dans l'esprit ;
Médecin d'intime souffrance,
Qui les retourne et les endort...
Souvent, pour alléger ta lourde et morne veille,
Sous tes doigts inspirés la lyre qui s’éveille,
Mêle d’ineffables accords
Aux mille accords errants qu’exhale la nature,
Aux soupirs de la nuit, au triste et long murmure
De l’onde expirant sur ses bords.
Car Celui qui dispense une eau féconde et pure
A l’humble fleur des...
Parés de lauriers éphémères,
Tu vois courir les plus pressés,
Et tu souris à leurs chimères,
Doux rêveur aux calmes pensers.
Mais parfois ton esprit s’étonne :
Pourquoi produire avant le temps ?
Les dons savoureux de l’automne
Ne se cueillent point au printemps.
N’importe ! dans leur folle ivresse,
Ils vont, ils vont, les...
Prends garde à Marchangy. La prose poétique
Est une ornière où geint le vieux Pégase étique.
Tout autant que le vers, certes, la prose a droit
À la juste cadence, au rhythme divin ; soit ;
Pourvu que, sans singer le mètre, la cadence
S’y cache et que le rhythme austère s’y condense.
La prose en vain essaie un essor assommant.
Le vers s’envole au ciel...
Enfant aux cheveux blonds que le rire accompagne,
Ne va pas, ne va pas jouer sur la montagne,
Et ne quitte jamais le seuil de ta maison
Pour suivre les troupeaux à la molle toison.
Reste, petit enfant, reste auprès de ta mère,
Car ce serait pour elle une douleur amère,
Et les nymphes, tes sœurs, gémiraient bien longtemps,
Si, voyant tes yeux...
À l’occasion de son retour d’Europe.
Quand le drapeau français, que la gloire illumine,
S’envola du sommet de nos murs en ruine,
Au milieu des navrants sanglots d’un peuple enfant,
Que l’Amérique avait toujours vu triomphant,
Aux bords du Saint-Laurent, dédaignés de Voltaire
Et convoités depuis cent ans par l’Angleterre,
Nos...
Que de fois j'ai rêvé, seule hélas ! sur la terre,
Un ange aux blonds cheveux qui me nommait sa mère,
Un enfant blanc et rose entre mes bras couché,
Jeune être souriant au soleil, à la vie,
Unique et cher espoir de mon âme ravie,
Trésor où mon amour se serait épanché !
Je le voyais déjà grandir dans ma pensée,
Comme un jeune arbrisseau dont la...
Tu savais bien qu’un jour il faudrait choir enfin,
Mais tu n’imaginais ni Séjan, ni Rufin.
Tu te croyais de ceux que la haine publique
Frappe furtivement d’un coup de foudre oblique ;
Tu t’étais figuré qu’on te renverserait
Sans te faire de mal, doucement, en secret,
Avec précaution, sans bruit, à la nuit close,
Et priant un ami de te dire la chose,...
Jeune homme au cœur léger., ne touche point la lyre,
Va demander ta joie aux rêves d’ici-bas.
La pensée est un glaive, et sa pointe déchire
La main de l’imprudent qui ne la connaît pas.
Au temps que Jupiter, de la voûte éthérée
Descendait, à l’odeur de l’hécatombe en feu,
Quelqu’un vit, sur l’autel, dans la coupe dorée,
Un reste de nectar...
S’il est une heure fortunée
Parmi nos heures d’ici-bas,
Une heure de paix couronnée,
Et de trêve à nos vains débats,
C’est l’heure, entre toutes bénie,
Où la strophe aux fraîches senteurs,
Pour nous, au vent de l’harmonie,
S’épanouit en vers chanteurs ;
C’est l’heure où quelque âme inconnue,
Sœur par l’accent et par le luth,...