• À Henri Winter.

    Minuit faisait jaillir, comme des étincelles,
    Les gerbes de ses sons qui, palpitant des ailes,
    Montaient et vibraient en tremblant,
    L'air était sec et vif ; la nuit calme et splendide ;
    Et le dôme du ciel, sans vapeur et sans ride,
    Était couvert d'or scintillant.

    La lune avait tendu les blancheurs de son voile ;
    On eût dit qu'...

  • (extrait)

    - Prends ma main, Voyageur, et montons sur la Tour. -
    Regarde tout en bas, et regarde à l'entour.
    Regarde jusqu'au bout de l'horizon, regarde
    Du nord au sud. Partout où ton oeil se hasarde,
    Qu'il s'attache avec feu, comme l'oeil du serpent
    Qui pompe du regard ce qu'il suit en rampant,
    Tourne sur le donjon qu'un parapet prolonge,
    D'où...

  • La voilà, pauvre mère, à Paris arrivée
    Avec ses deux enfants, sa fidèle couvée !
    Veuve, et chaste, et sévère, et toute au deuil pieux,
    Elle les a, seize ans, élevés sous ses yeux
    En province, en sa ville immense et solitaire,
    Déserte à voir, muette autant qu'un monastère,
    Où croît l'herbe au pavé, la triste fleur au mur,
    Au coeur le souvenir long,...

  • Qui frappe l'air, bon Dieu ! de ces lugubres cris ?
    Est-ce donc pour veiller qu'on se couche à Paris ?
    Et quel fâcheux démon, durant les nuits entières,
    Rassemble ici les chats de toutes les gouttières ?
    J'ai beau sauter du lit, plein de trouble et d'effroi,
    Je pense qu'avec eux tout l'enfer est chez moi :
    L'un miaule en grondant comme un tigre en furie ;...

  • A Paris, en été, les soirs sont étouffants.
    Et moi, noir promeneur qu'évitent les enfants,
    Qui fuis la joie et fais, en flânant, bien des lieues,
    Je m'en vais, ces jours-là, vers les tristes banlieues.
    Je prends quelque ruelle où pousse le gazon
    Et dont un mur tournant est le seul horizon.
    Je me plais dans ces lieux déserts où le pied sonne,
    Où je suis...

  • Je suis un pâle enfant du vieux Paris, et j'ai
    Le regret des rêveurs qui n'ont pas voyagé.
    Au pays bleu mon âme en vain se réfugie,
    Elle n'a jamais pu perdre la nostalgie
    Des verts chemins qui vont là-bas, à l'horizon.
    Comme un pauvre captif vieilli dans sa prison
    Se cramponne aux barreaux étroits de sa fenêtre
    Pour voir mourir le jour et pour le voir...

  • C'est vrai, j'aime Paris d'une amitié malsaine ;
    J'ai partout le regret des vieux bords de la Seine
    Devant la vaste mer, devant les pics neigeux,
    Je rêve d'un faubourg plein d'enfants et de jeux.
    D'un coteau tout pelé d'où ma Muse s'applique
    A noter les tons fins d'un ciel mélancolique,
    D'un bout de Bièvre, avec quelques chants oubliés,
    Où l'on tend une...

  • L'ombre s'évapore,
    Et déjà l'aurore
    De ses rayons dore
    Les toits d'alentour ;
    Les lampes pâlissent,
    Les maisons blanchissent,
    Les marchés s'emplissent
    On a vu le jour.

    De la Villette,
    Dans sa charrette,
    Suzon brouette
    Ses fleurs sur le quai,
    Et de Vincenne
    Gros Pierre amène
    Ses fruits que traîne
    Un âne...

  • En tous lieux, la foule
    Par torrents s'écoule ;
    L'un court, l'autre roule ;
    Le jour baisse et fuit ;
    Les affaires cessent,
    Les dîners se pressent,
    Les tables se dressent,
    Il est bientôt nuit.

    Là, je devine
    Poularde fine
    Et bécassine
    Et dindon truffé ;
    Plus loin, je hume
    Salé, légume,
    Cuits dans l'écume
    D'un boeuf...

  • Ah, Curnonsky, non plus que l'aube,
    N'était bien rigolo
    Il regardait le fil de l'eau.
    C'était avant les Taube.

    Et moi j'apercevais - pourtant
    Qu'on fût loin de Cythère -
    Un objet singulier. Mystère :
    C'est un éléphant.

    Notre maison étant tout proche,
    On le prit avec nous.
    Il mettait, pour chercher des sous
    Sa trompe dans ma...