• L’Europe renaissait, et la pensée humaine
    Si longtemps prisonnière allait rompre sa chaîne ;
    Jours de lutte et de sang pleins d’ombre et de soleil.
    Déjà la Renaissance et son éclat vermeil
    Avaient illuminé la nuit sombre du cloître.
    L’esprit voulait enfin s’affranchir et s’accroître ;
    Et, bravant l’Empereur, et le Pape, et l’Enfer,
    De sa voix d’ouragan...

  • Suspendue aux rameaux plus qu’obligeants d’un frêne,
    Tu t’inclines vers l’eau limpide de la Seine :
    Ton visage charmant s’y reflète, et tu ris.
    Très-bien. C’est un miroir qui vaut ceux de Paris.
    Mais, prends bien garde, enfant ! si tout à coup le fleuve
    Te volait ton image exquise et toute neuve,
    Et s’en allait, joyeux, la porter à la mer !…
    Vois-tu...

  • Comme nous revenions du Bois, un soir de mai,
    Un de ces tièdes soirs où notre âme amollie
    Se laisse aller au fil de la mélancolie,
    Pour s’être trop mirée aux yeux de l’être aimé,

    Elle s’assit, très-triste, au fond d’une causeuse ;
    Et sur le velours sombre et vert, son front pâli
    Ressortit lumineux dans un jour affaibli,
    Le jour mystérieux et doux d’...

  • Sous les abris pompeux des hautes colonnades,
    Et dans les carrefours bruyants du vieux Paris,
    Que j’ai suivi de fois vos lentes promenades,
    Logogriphes vivants, sphinx par moi seul compris !

    La foule en vous voyant s’écarte méprisante,
    Car vos habits sont vieux, et vos manteaux usés,
    Mais moi, je vous observe et je me représente
    Les drames qu’ont...

  • L’âme écoute toute ravie
    Le rossignol qui chante en vous :
    Vous feriez adorer la vie,
    En l’éclairant de vos yeux doux.

    Votre voix a le charme étrange
    Les appels d’oiseau dans les bois :
    Vous rappelez cette mésange
    Qu’un pauvre moine d’autrefois

    Écouta pendant cent années
    Chanter au fond d’une forêt :
    Les fleurs pleuraient...

  • Quand le vaisseau, bercé par la mer caressante,
    S’arrête aux bords heureux de la terre de Zante
    Que les Italiens nomment « fleur du Levant »‚
    Le voyageur vers lui voit voler cent nacelles,
    Toutes pleines de fleurs humides et nouvelles
    Dont l’âme errante flotte et parfume le vent.

    On dirait des jardins balancés sur les lames,
    Et ce sont des œillets...

  • O mon petit pays de Bresse si modeste !
    Je t’aime d’un cœur franc ; j’aime ce qui te reste
    De l’esprit des aïeux et des mœurs d’autrefois ;
    J’aime les sons traînants de ton langage antique,
    Et ton courage simple, et cette âme rustique
    Qu’on sent frémir encore au fond de tes grands bois.

    J’aime tes hommes forts et doux, tes belles filles,
    Tes dimanches...

  • Nous irons en suivant les bois, si tu m’écoutes,
    Jusqu’au bord du ravin planté de saules creux :
    On trouve plus souvent aux champs les amoureux
    Dans les petits sentiers que sur les grandes routes.

    Par ces chemins perdus nous aimons à passer.
    Notre amour s’y repose, et souvent y demeure.
    Nous partirons après une halte d’une heure,
    Et puis nous...

  • Éclosion des jeunes âmes !
    Bien d’autres rêves ont peuplé
    Mon cœur, madame, et l’ont gonflé,
    Depuis qu’enfants nous nous croisâmes.
    Amour naïf vite envolé !
    Meurt-elle en nous la rêverie
    Qui berçait les cœurs enfantins ?
    Non, je revois l’île fleurie,
    Les varangues et les jardins.
    Bien séparés sont nos destins !
    Mais jeune fille...