Le Parnasse contemporain/1876/Zante

Quand le vaisseau, bercé par la mer caressante,
S’arrête aux bords heureux de la terre de Zante
Que les Italiens nomment « fleur du Levant »‚
Le voyageur vers lui voit voler cent nacelles,
Toutes pleines de fleurs humides et nouvelles
Dont l’âme errante flotte et parfume le vent.

On dirait des jardins balancés sur les lames,
Et ce sont des œillets plus rouges que les flammes,
D’autres blancs, délicats comme un beau teint d’enfant,
Et des roses de pourpre et des roses pâlies,
Et de grands lis royaux, dont les mélancolies
Gardent je ne sais quoi d’âpre et de triomphant.

Et lorsque le vaisseau, parti pour d’autres mondes,
Escalade les plis démesurés des ondes
Qui l’emportent au ciel brumeux de l’Occident,
Longtemps encor, malgré la vapeur, les cordages
Et les groupes bronzés des matelots sauvages,
Les fleurs de Zante en font un oasis flottant.

Moi-même, aux jours obscurs où mes tristes pensées
Évoquent la beauté des heures éclipsées,
Que de fois j’ai revu, — mirage décevant, —
Ton ciel clair, tes flots bleus semés de pierreries,
Et les riches bouquets tes barques fleuries,
O Zante, fleur lointaine et douce du Levant !

Collection: 
1971

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