• Un coffret de cuir fauve à l’écusson d’or plat
    Contient les deux flacons de cristal vert & rouge ;
    Dans le fond, par moments, un liquide qui bouge
    Sous l’étui de velours amortit son éclat.

    Ouvrez l’un d’eux. La plus limpide des essences
    Y nage, & fait monter subtilement dans l’air,
    Comme une apothéose, un tableau vague & cher
    Des soirs,...

  • Je veux, comme un artiste amoureux des émaux,
    Fondre patiemment les teintes délicates
    De la rose, du ciel, de l’or & des agates
    Pour en faire des prés, du soleil, des hameaux.

    Sur le fond de médaille, à travers les rameaux,
    Les murs remis à neuf auront des blancheurs mates,
    Et dans les blés vernis mille fleurs écarlates
    Inviteront les pieds des...

  • Des vases blancs & bleus sur leurs tiges dorées,
    Droits, & fiers de la pourpre exotique des fleurs ;
    Une lampe d’albâtre avivant ses pâleurs,
    Clair de lune neigeux & calme des soirées ;

    Des panneaux, où la main féminine agrafa
    Sur le satin, lamé d’or & d’argent, des armes ;
    Un sachet, exhalant la fleur des anciens charmes
    Dans l’...

  • Pierre, le Bien-Nommé, revient de Palestine.
    Jadis il est sorti, bardé de fer, & tel
    Il rentre sous la porte antique du castel
    Qu’une fière devise à la gloire destine.

    Dans l’oratoire bleu madame Valentine
    Pour l’époux éloigné tremble au pied de l’autel,
    Et de blancs chérubins vers le Père immortel
    Guident, le long des cieux, la prière enfantine...

  • Porphyris te consacre, ô Bakkhos, Dieu du vin,
    Ce thyrse couronné d’une pomme de pin,
    La peau de cerf, longtemps enroulée à ses hanches,
    Ce sistre, ce tambour, ces bandelettes blanches,
    Instruments et témoins de sa jeune fureur !
    Elle ne hante plus les grands bois pleins d’horreur,
    Sous le mystique van, ceinte de la nébride :
    Car sa tête blanchit et...

  • Maître de Ravenswood, le cheval allait vite
    Dont le pied labourait les dunes, ce matin,
    Lorsque du haut des monts je surpris votre fuite.

    La rosée emperlait la fougère et le thym
    Au bas du vieux donjon qui vous avait vu naître
    Et qui vous vit alors combler votre destin.

    Voici que de là-bas je crus vous reconnaître
    Aux premières lueurs qui blanchirent...

  • La droite en votre sein, retiré dans la tente
    Que forme autour de vous l’eau des nuages noirs,
    Vous vous taisez, Seigneur ! votre gloire éclatante
    Ne fendra-t-elle plus les sacrés réservoirs ?

    Vos ennemis, portant l’orgueil sur leurs visages,
    Ne cachent même plus leur fond d’iniquité ;
    Jamais vos serviteurs n’ont subi plus d’outrages :
    Comme eux tous...

  • Ma mère, je n’aurai ni l’épouse semblable
    A la vigne appuyée au mur de la maison,
    Ni les enfants rangés tout autour de la table
    Tels que des oliviers dans leur jeune saison.

    Béni par le Très-Haut, l’homme simple et robuste
    S’accroît et s’enrichit, et ses greniers sont pleins.
    Il est dit, non de tous, mais seulement du Juste :
    « Il mangera le fruit des...

  • Malade et seul, n’ayant pour m’aider à souffrir
    Ni les soins maternels ni l’espoir de guérir,
    Blessé d’un chaste amour, et contraint de me taire
    Comme si je brûlais d’une ardeur adultère,
    Incapable de vivre, hélas ! de plus en plus,
    J’attends venir les jours et les maux dévolus.
    Je ne chercherai pas un secours à mes peines
    Dans le fragile appui des...

  • Étoile de douceur, Miroir de chasteté,
    Vase de certitude, ô merveilleuse Gerbe
    Où tendresse est liée avec austérité !

    Le Seigneur nous a dit : « Va ! fléchis ta superbe.
    L’homme est la fleur des champs qui fleurit pour un jour,
    Et ce jour est rapide et passe comme l’herbe.

    « Le puissant, tout à coup, croule comme une tour,
    Et voici, flagellé dans la...