• Je dis pour les cœurs ingénus
    La chanson de Marthe aux pieds nus.

    Marthe dès l’aube a quitté son aïeule ;
    Marthe aux pieds nus est au bois toute seule.

    ...

  • Triste de quelque amour perdu,
    Rêvant aux délices passées,
    J’étais sur la terre étendu
    Parmi les bruyères froissées.

    L’ombre, en vibrant, montait dans l’air,
    Des arbres profonds vers la nue,
    Et la lune, au bord du ciel clair,
    Découvrait son épaule nue.

    Comme s’accroissait mon émoi
    De l’émoi fraternel des choses,
    Un rossignol, tout...

  • Étoile de douceur, Miroir de chasteté,
    Vase de certitude, ô merveilleuse Gerbe
    Où tendresse est liée avec austérité !

    Le Seigneur nous a dit : « Va ! fléchis ta superbe.
    L’homme est la fleur des champs qui fleurit pour un jour,
    Et ce jour est rapide et passe comme l’herbe.

    « Le puissant, tout à coup, croule comme une tour,
    Et voici, flagellé dans la...

  • Vous me grondez, amis, de tant parler des morts !
    Ma voix, de jour en jour, traîne plus monotone :
    Tels, quand l’arbre a senti les rafales d’automne,
    Les rameaux dépouillés ont de plus sourds accords.

    J’en parle encor trop peu : c’est le seul de mes torts !
    Si je songeais à ceux dont le départ m’étonne,
    Combien je maudirais ma gaîté qui détonne !
    Le...

  • La petite rivière, bleue
    Si peu que le ciel ait d’azur,
    D’ici fait encore une lieue,
    Puis verse au fleuve son flot pur.

    Plus grande, elle serait moins douce,
    Elle n’aurait pas la lenteur
    Qui dans les herbes mène et pousse
    Son cours délicat et chanteur.

    Elle n’aurait pas de prairies
    Plus vertes si près de la main,
    Non plus que ces...

  • La campagne était fraîche et tout ensoleillée ;
    Le souffle du matin passait les blés verts,
    Et je marchais dans l’herbe odorante et mouillée
    En récitant des vers.

    J’étais gai, bien portant, et libre au fond de l’âme ;
    J’avais enfin dompté mon douloureux amour,
    Et nul amer...

  • C’est le gai rendez-vous des bêtes du bon Dieu,
    L’endroit frais et charmant, le coin béni, le lieu
    Cher aux petits oiseaux, aimé des libellules,
    Où dame abeille accourt en quittant ses cellules,
    Où le printemps se joue au pied des verts buissons,
    Où l’écho ne redit jamais que des chansons.
    Là le merle moqueur et la mésange bleue,
    Le bouvreuil, le linot...

  • Tes yeux ont la couleur de la source où tu bois.
    Les baisers que je prends sur tes lèvres pressées,
    Font le doux bruit de l’eau qui glisse dans les bois,
    Sur un lit de verdure et de feuilles froissées.

    Ta voix, vive et légère, est comme l’eau qui fuit.
    Elle chante comme elle, et comme elle soupire.
    Des sanglots de la source elle a gardé le bruit ;
    Le...

  • La poudre des astres brisés
    Roule encor par les étendues :
    Mais où vont le vent des baisers
    Et l’âme des amours perdues ?

    Comme des étoiles, nos cœurs
    Sont faits de lumière immortelle ;
    Ils se brisent aux chocs vainqueurs ;
    Mais leur poussière où donc va-t-elle ?

    Nous voyons couler notre sang
    Au bord de la nue enflammée,
    Dans le...

  • O belle, dont le corps semble un vivant poëme,
    Pourquoi m’ouvrir les bras, sans me dire : Je t’aime ?
    Même à l’heure d’amour, contre ton sein pâmé
    Tu ne me presses pas ainsi qu’un bien-aimé ;
    Tu ne dis pas le mot envié des dieux même ;
    Tu soupires : je meurs ; tu ne dis pas : Je t’aime !
    Et pourtant ton œil darde un feu délicieux.
    Tel un ange tombé qu’...