Reste belle

 
 Que ton feu me dévore !
 Plaisir ou bien effroi,
 Tout me ravit ; j'adore
 Tout ce qui vient de toi,
 Et la joie ou les larmes,
 Tout a les mêmes charmes.

 Ta voix qui se courrouce,
 Quand j'en étais sevré,
 Pourtant semble plus douce
 A mon cœur enivré
 Que les chansons lointaines
 Qui tombent des fontaines.

 Garde ta barbarie,
 Tes méchants désaveux ;
 Tu ne peux, ma chérie,
 Empêcher tes cheveux,
 Où le soleil se mire,
 De vouloir me sourire !

 Tes pensives prunelles
 Ont emprunté des cieux
 Leurs splendeurs éternelles ;
 Ton front délicieux
 Prend en vain l'air morose,
 Ta bouche est toujours rose.

 Malgré tes forfaitures,
 Les roses de l'été
 Ornent de lueurs pures
 Ta sereine beauté
 A ta haine rebelle.
 Il suffit, reste belle !

 Non, ta grâce de femme,
 Rien ne peut la ternir ;
 Elle est un sûr dictame,
 Et tu vins pour tenir
 La quenouille d'Omphale
 Dans ta main triomphale.

Collection: 
1843

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