I
Vois, mignonne ! tes sœurs aimées,
Ces fraîches fleurs dont le matin
Remplit de larmes embaumées
Les blanches urnes de satin...
Elles sont l'image légère,
Le frêle emblème du bonheur :
La fleur, hélas ! est éphémère,
Et le bonheur est une fleur !
II
De leur parure dépouillées,
Penchant languissamment leur front,
Par le vent jaloux effeuillées,
Ce soir, elles se faneront...
La beauté, fragile chimère,
Bien vite aussi perd sa fraicheur :
La fleur, hélas ! est éphémère,
Et la beauté n'est qu'une fleur !
III
Ainsi du printemps de la vie,
S'évanouissent les beaux jours,
Et d'ombre et de deuil est suivie
La saison des jeunes amours...
Aimons du moins quand, sur la terre,
Tout fleurit comme en notre cœur...
La fleur, hélas ! est éphémère,
Et la jeunesse est une fleur !
IV
Trop tôt l'espérance infidèle,
Sourde à nos désirs empressés,
Va fuir, emportant sur son aile
Nos songes les plus caressés...
Mais, tandis que douce et prospère,
Elle sourit à notre ardeur,
Aimons... La fleur est éphémère,
Et l'espérance est une fleur !
V
Aimons, aimons, puisque sans cesse,
Impitoyable dans son cours,
Le temps ravit à notre ivresse
L'heure qu'il ajoute à nos jours...
Vidons la coupe passagère
Où rit la divine liqueur :
La fleur, hélas ! est éphémère,
Et le plaisir est une fleur !
VI
Le cœur tout vibrant d'allégresse,
Goûtons la tendre volupté ;
Aimons, aimons !... C'est la sagesse :
Hors l'amour, tout est vanité !
L'amour seul enchante la terre,
Sachons en cueillir la primeur :
La fleur, hélas ! est éphémère,
Et la tendresse est une fleur !