La Vénus de Vienne

 
DANS ce marbre héroïque en creusant ta statue,
Un artiste inconnu fixa l’éternité,
O toi dont la splendeur nous fait vivre et nous tue,
Femme de qui les temps connurent la Beauté.

Il te fit cette image immortelle et profonde
Où nos premiers regards retrouvent, éperdus,
L’amante impitoyable et la mère féconde
A qui tous nos malheurs et tous nos maux sont dus !

Pour leur double labeur il arrondit tes hanches
Où meurent les désirs, où les races naîtront ;
Et pencha le sillon de tes épaules blanches
Vers le joug que lui fait la caresse ou l’affront.

Sous ton col généreux il gonfla des mamelles
Robustes à la soif comme aux enlacements,
Où viennent boire, ainsi qu’à des coupes jumelles,
La bouche des petits et celles des amants.

De plis lourds et profonds il sillonna ton ventre,
Lac vivant qu’ont creusé les âges révolus,
D’où l’humanité sort, où l’humanité rentre.
Comme font de la mer le flux et le reflux.

Car, c’est quand l’homme ploie à l’angoisse de vivre
Que l’amour le saisit et, de son bras géant,
Le pousse pantelant et comme une bête ivre,
Vers le gouffre natal où dormait son néant !

Collection: 
1857

More from Poet

... C'est qu'ils portent en eux, les arbres fraternels,
Tous les débris épars de l'humanité morte
Qui flotte dans leur sève et, de la terre, apporte
A leurs vivants rameaux ses aspects éternels.

Et, tandis qu'affranchis par les métamorphoses,
Les corps brisent...

 
Parlez, terrestres voix, chant nocturne des choses,
Des langues à venir chuchotement lointain,
Cris des enfantements, chœur des métamorphoses,
Dernier adieu des morts dont la forme s’éteint ;

Bruit des déchirements sans fin de la Matière,
Lent et...

 
SOUS la calme splendeur de son front ingénu
Quelle pensée habile ou quel rêve sommeille ?
On croirait voir encor sur sa bouche vermeille
Un mystique sourire imprégné d’inconnu.

Le col harmonieux se dresse, pur et nu,
Sous la nuque arrondie aux gerbes d’or...

 
DANS le vieil hôtel catholique
J’aime surtout la grande cour
Où veille un fantôme de tour
Sur lequel un lierre s’applique.

Un platane mélancolique
Y garde avec un vague amour
Une urne à l’austère contour
Où dort, sans doute, une relique

...

 
LA vie est comme une colline
Dont l’aube éclaire le penchant,
Prompte à gravir et qui s’incline
Bientôt vers le soleil ...