Fond de jardin

 
Le noir lierre aux douces roses enlacé
Décore le portique et son treillage vert,
Et l’on voit s’entr’ouvrir le pétale de chair
Près du feuillage en cœur qui vers lui s’est glissé ;

Une amoureuse odeur de soir et de passé
Se mêle au dur parfum terrestrement amer ;
La fleur de sang sourit à la feuille de fer,
Car de leur double poids son orgueil s’est lassé.

Un bassin, à l’écart, où rôde, ombre d’or grave,
Un cyprin, ça et là, qu’une herbe glauque entrave,
S’engourdit, et sa moire à jamais léthargique

Mire un dauphin de saxe arqué sur son piédouche
Et, seule, la plus haute au faîte du portique,
L’image, inverse en l’eau, d’une rose à sa bouche.

Collection: 
1884

More from Poet

 
Je ne veux de personne auprès de ma tristesse
Ni même ton cher pas et ton visage aimé,
Ni ta main indolente et qui d’un doigt caresse
Le ruban paresseux et le livre fermé.
 
Laissez-moi. Que ma porte aujourd’hui reste close ;
N’ouvrez pas ma...

 
« N’avez-vous pas tenu en vos mains souveraines
La souplesse de l’eau et la force du vent ?
Le nombreux univers en vous fut plus vivant
Qu’en ses fleuves, ses flots, ses fleurs et ses fontaines. »

C’est vrai. Ma bouche a bu aux sources souterraines ;
La...

 
O Vérone ! cité de vengeance et d’amour,
Ton Adige verdi coule une onde fielleuse
Sous ton pont empourpré, dont l’arche qui se creuse
Fait l’eau de bile amère et de sang tour à tour !

Le dôme, le créneau, la muraille, la tour,
Le cyprès dur jailli de la...

 
Sépulcre de silence et tombeau de beauté,
La Tristesse conserve en cendres dans son urne
Les grappes de l’automne et les fruits de l’été,
Et c’est ce cher fardeau qui la rend taciturne,

Car sa mémoire encore y retrouve sa vie
Et l’heure disparue avec la...

 
Sois nombreux par le Verbe et fort par la Parole,
Actif comme la ruche et comme la cité ;
Imite tour à tour avec fécondité
La foule qui demeure et l’essaim qui s’envole.

Travaille, croîs, grandis ! que ta hauteur t’isole,
Et dresse dans le ciel sur le monde...