Dénoncé à celui qui chassa les vendeurs du Temple

 
La vieille en pleurs disait : — La misère en est cause,
Pour mon bon vieux défunt je n'aurai pas grand'chose,
Un seul cierge, un seul prêtre, et deux mots d'oraison
À la porte. On peut bien entrer dans la maison,
Avoir l'autel, avoir les saints, avoir les châsses,
Tout le clergé chantant des actions de grâces,
Des psaumes, des bedeaux, tout ; mais il faut payer,
Hélas ! et moi qui dois trois termes de loyer,
Je n'ai pas de quoi faire enterrer mon pauvre homme. —

Ainsi parlait la veuve, et je songeais à Rome.
Quoi ! le riche et le pauvre ont des enterrements
Différents ; l'un a droit aux embellissements,
L'autre pas ; l'un descend chez les morts, l'autre y tombe,
Et l'un n'est pas l'égal de l'autre dans la tombe !

Quoi ! Dieu n'est pas gratis ! Quoi ! prêtres, le Martyr,
Le Saint, l'Ange, ne veut de sa boîte sortir
Que pour de l'or ; sinon vous refermez l'armoire
Sur le ciel, sur la Vierge et sa robe de moire,
Et sur l'enfant Jésus rose et couleur de chair !
Quoi ! votre crucifix coûte plus ou moins cher,
Selon qu'il va devant ou qu'il marche derrière !
Prêtres, vous mesurez au cercueil la prière ;
Longue, si le cadavre est grand ; courte, s'il n'est
Qu'un méchant pauvre mort, — le prêtre s'y connaît, —
Cloué dans une bière étroite et misérable !
Prêtres, le hêtre aux champs, l'aulne, l'ormeau, l'érable,
Versent l'ombre pour rien ; Mai ne dit pas aux prés :
Les fleurs, c'est tant. Voyez mon tarif. Vous paierez
Tant pour la violette et tant pour la lavande !
Ah ! Dieu veut qu'on le donne et non pas qu'on le vende !
La mort fut toujours juste et toujours nivela ;
Reconnaissez au moins cette égalité-là ;
Respectez le cercueil sans mépriser la bière ;
Faites le même accueil à la même poussière,
Sur le même silence ayez le même chant.
Quoi ! je cherche un apôtre et je trouve un marchand !
C'est d'un comptoir que part l'escalier de la chaire.
Que diraient-ils de voir leurs psaumes à l'enchère,
Ces hommes qui songeaient, pâles, dans le désert ?
Ah ! ce De Profundis superfin qui ne sert
Qu'aux riches, et qu'on met en musique, et qu'on brode,
Que Jésus n'aurait pas et qu'obtiendrait Hérode,
Ô terreur ! il n'en faut pas tant pour faire Dieu
Farouche, et pour changer en ciel noir le ciel bleu !
La prière vendue a l'accent du blasphème.
Hélas ! c'est de la nuit que dans les cœurs on sème.
L'ombre, au-dessus de vous, mages qui brocantez,
Efface brusquement toutes les vérités.
Quoi ! vous ne voyez pas l'éclipse formidable !
Vous qui savez combien l'abîme est insondable,
Vous vous faites vendeurs !

                                         Prêtres, l'adossement
De l'échoppe suffit pour que le firmament
Épaississe au-dessus de l'église ses voiles ;
La boutique retire au temple les étoiles.

Collection: 
1822

More from Poet

  • Mivel ajkamhoz ért színültig teli kelyhed, és sápadt homlokom kezedben nyughatott, mivel beszívtam én nem egyszer drága lelked lehelletét, e mély homályú illatot, mivel titokzatos szived nekem kitárult, s olykor megadatott beszédét hallanom, mivel ott zokogott, mivel mosolyra lágyult szemed...

  • A lába csupaszon, a haja szétziláltan, kákasátorban ült, térdéig meztelen; azt hittem hirtelen, hogy tündérre találtam, s szóltam: A rétre, mondd, eljönnél-e velem? Szeméből rámsütött az a parázs tekintet, amely, ha enged is, szép és győztes marad, s szóltam: A szerelem hónapja hív ma minket,...

  • Olyan a szerelem, mint a gyöngyszemű harmat, amelytől fénylik a szirom, amelyből felszökik, kévéjében a napnak, szivárvány-szikra, miliom. Ne, ne hajolj reá, bárhogy vonz e merész láng, ez a vízcseppbe zárt, percnyi kis fényözön - mi távolabbról: mint a gyémánt, az közelebbről: mint a könny.

  • Pourquoi donc s'en est-il allé, le doux amour ?
    Ils viennent un moment nous faire un peu de jour,
    Puis partent. Ces enfants, que nous croyons les nôtres,
    Sont à quelqu'un qui n'est pas nous. Mais les deux autres,
    Tu ne les vois donc pas, vieillard ? Oui, je les vois,...

  • Puisque nos heures sont remplies
    De trouble et de calamités ;
    Puisque les choses que tu lies
    Se détachent de tous côtés ;

    Puisque nos pères et nos mères
    Sont allés où nous irons tous,
    Puisque des enfants, têtes chères,
    Se sont endormis avant nous ;...