………Un père est un don précieux
Qu’on n’obtient qu’une fois de la bonté des cieux.
(Ducis)
Ô l’amour d’une mère ! amour que nul n’oublie !
Pain merveilleux qu’un Dieu partage et multiplie !
Table toujours servie au paternel foyer !
Chacun en a sa part, et tous l’ont tout entier.
(V. Hugo)
Encore un dernier chant, — et ma lyre éphémère
S’échappe de mes mains, et s’éteint en ce jour,
Mais que ces sons mourants, ô mon père, ma mère !
Soient exhalés pour vous, objets de mon amour.
De cet hymne d’adieu si la note plaintive
S’envole tristement pour ne plus revenir,
Vous ne l’oublîrez pas ; votre oreille attentive
L’empreindra pour jamais dans votre souvenir.
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Dans les sables brûlants du désert de la vie
Quand je marchais souffrant, seul avec ma raison,
Ainsi qu’une oasis la douce poésie
À mes yeux fascinés s’offrit à l’horizon.
Ce doux aspect alors ranima mon courage,
Et sur un sol brûlant, sous des cieux incléments,
Pieds nus je m’avançai vers ce riant ombrage,
Qui devait m’abriter de ses rameaux charmants.
Mais, hélas ! dans me course errante et douloureuse
Mes pieds se sont meurtris ; sanglant et déchiré,
Hâletant, épuisé, dans cette route affreuse,
Je crus atteindre encor ce but tant désiré.
Vain espoir ! je fléchis sous le poids de ma peine :
Le malheur, ce simoun au souffle empoisonné,
M’atteignit dans son vol, et sa brûlante haleine
M’enveloppa bientôt sur ce sol calciné !…
Mais vous m’avez prêté votre appui tutélaire
Dans ce triste naufrage où périt mon bonheur,
Et votre amour encore, ô mon père, ma mère !
Vient ranimer l’espoir, qui s’éteint dans mon cœur.
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Hélas ! si du tombeau, perçant l’étroit espace,
Mon nom pouvait, un jour, voler à l’avenir,
Il irait, parcourant sa lumineuse trace,
De vos douces vertus graver le souvenir.
Dans son sillon de gloire à travers tous les âges,
Il parlerait de vous aux êtres généreux ;
Il leur dirait combien furent nobles et sages
Les sentiments divers de vos cœurs vertueux….
Mais non ! le faible accord de ma lyre plaintive
Expire autour de moi sans produire d’échos.
Ainsi soupire et meurt la brise fugitive
Qui d’un lac azuré vient caresser les flots.
Ah ! si l’affreux oubli dans son linceul immense
Ensevelit bientôt et mon nom et mes vers,
Je conserve, du moins, la touchante espérance
Qu’ils seront à vos cœurs toujours présents et chers.
Avril 1841