Laissez-moi m’en aller vers les fleurs, mes amies,
En ce calme jardin où s’enclôt leur clarté :
La lune est déjà haute et luit au ciel d’été
Et l’étang dort, près des fontaines endormies.
Je suis las de marcher par le soir oppresseur ;
J’ai besoin de sentir ce qui est pur sur terre
Pencher vers moi sa bonté d’âme involontaire
Et donner à ma force un peu de sa douceur.
Fleurs tranquilles, avec vos tons qui se fiancent
Aux changeantes splendeurs de la nuit et du jour,
Si vieux soit-il, mon cœur garde encor dans l’amour
La naïve ferveur dont brûlait son enfance.
Il s’offre à s’en vient vers lui, tout simplement,
Avec un chant naïf au détour de la route;
Il est si content d’être et sans feinte et sans doute
Qu’il ne veut point savoir qu’on trahit et qu’on ment.
Joyeusement, il s’enfonce dans sa folie.
Qu’importe si demain il se doit repentir
D’avoir donné l’essor au pur et clair désir
Que nul ne comprend plus sur la terre vieillie !
Il se sera senti du moins comme autrefois
Simple, fervent, naïf et doux devant les hommes.
Et c’est en respirant vos chairs et vos aromes,
Ô Fleurs, qu’il aura recouvré toute sa foi.
Toujours vous lui fûtes les bonnes conseillères :
On ne sait quoi de sûr et d’égal règne en vous ;
Que croisse à vos côtés ou la ronce ou le houx,
Rien ne trouble jamais votre ardeur régulière.