Sur les eaux

 
Au poète Auguste Dorchain.

Sous le ciel printanier, où le soleil levant
Commence de verser sa lueur incertaine,
Le lac voisin, moiré par l’haleine du vent,
Berce un léger esquif sur son azur mouvant,
Embaumé des senteurs subtiles du troène,
Sous le ciel printanier, où le soleil levant
Commence de verser sa lueur incertaine.

La nacelle, fendant les flots harmonieux
Sous les élans rythmés de la rame sonore,
Balance dans ses flancs un couple d’amoureux,
Qui va bientôt tirer sur le rivage ombreux,

Effleuré des rayons indécis de l’aurore,
La nacelle fendant les flots harmonieux
Sous les élans rythmés de la rame sonore.

La brise nous apporte en passant des fragments
Du fébrile entretien du couple sur la lame.
Nous savons qu’un soupçon torture un des amants
Et qu’ils se font tous deux de tragiques serments ;
Car, en dépit du bruit cadencé de la rame,
La brise nous apporte en passant des fragments
Du fébrile entretien du couple sur la lame.

À mesure que monte à l’horizon lointain
Le disque du soleil libre de tout nuage,
Plus gaîment, dans le calme et la paix du matin,
Le lac donne aux rochers son baiser argentin,
Plus gaîment le bouvreuil siffle sous le feuillage,
A mesure que monte à l’horizon lointain
Le disque du soleil libre de tout nuage.

Mais tout à coup, jetant l’épouvante aux oiseaux,
Résonnent des mots pleins d’indicible détresse,
Suivis d’un clapotis sinistre dans les eaux.
L’esquif allait frôler un fouillis de roseaux,
Que la brise faisait chanter sous sa caresse ;

Mais tout à coup, jetant l’épouvante aux oiseaux,
Résonnent des mots pleins d’indicible détresse.

Un double suicide, hélas ! a profané
Le pur cristal du lac que l’aurore illumine.
Ce soir, on trouvera, près du bord consterné,
Le couple enseveli sous l’onde, l’œil tourné
Vers le ciel d’où descend la clémence divine.
Un double suicide, hélas ! a profané
Le pur cristal du lac que l’aurore illumine.

Et la vague et le vent, qui charmaient les échos,
Gémissent par moments comme un glas funéraire.
La nature attristée a de poignants sanglots
Pour pleurer sur la mort de ceux qui dans les flots
Ont cherché du suprême oubli l’ivresse amère.
Et la vague et le vent, qui charmaient les échos,
Gémissent par moments comme un glas funéraire.

Collection: 
1912

More from Poet

Notre langue naquit aux lèvres des Gaulois.
Ses mots sont caressants, ses règles sont sévères,
Et, faite pour chanter les gloires d'autrefois,
Elle a puisé son souffle aux refrains des trouvères.

Elle a le charme exquis du timbre des Latins,
Le séduisant brio du...

La nuit d'hiver étend son aile diaphane
Sur l'immobilité morne de la savane
Qui regarde monter, dans le recueillement,
La lune, à l'horizon, comme un saint-sacrement.
L'azur du ciel est vif, et chaque étoile blonde
Brille à travers les fûts de la forêt profonde....

Derrière deux grands boeufs ou deux lourds percherons,
L'homme marche courbé dans le pré solitaire,
Ses poignets musculeux rivés aux mancherons
De la charrue ouvrant le ventre de la terre.

Au pied d'un coteau vert noyé dans les rayons,
Les yeux toujours fixés sur...

C'est un après-midi du Nord.
Le ciel est blanc et morne. Il neige ;
Et l'arbre du chemin se tord
Sous la rafale qui l'assiège.

Depuis l'aurore, il neige à flots ;
Tout s'efface sous la tourmente.
A travers ses rauques sanglots
Une cloche au loin se...

 
À Mme C. P.

La jeune mère, avec son fils, sur le gazon
Du parc vient de humer la brise printanière.
Le soleil moribond de sa lueur dernière
Empourpre vaguement le bord de l’horizon.

À peine le baiser du vent met un frisson
Dans les...