Vivre comme en exil, vivre sans voir personne
Dans l’immense abandon d’une ville qui meurt,
Où jamais l’on n’entend que la vague rumeur
D’un orgue qui sanglote ou du Beffroi qui sonne.
Se sentir éloigné des âmes, des cerveaux
Et de tout ce qui porte au front un diadème ;
Et, sans rien éclairer, se consumer soi-même
Tel qu’une lampe vaine au fond de noirs caveaux.
Être comme un vaisseau qui rêvait d’un voyage
Triomphal et joyeux vers le rouge équateur
Et qui se heurte à des banquises de froideur
Et se sent naufrager sans laisser un sillage.
Oh ! vivre ainsi ! tout seul, tout seul ! voir se flétrir
La blanche floraison de son Âme divine,
Dans le dédain de tous et sans qu’aucun devine,
Et seul, seul, toujours seul, se regarder mourir !