• Rappelez-vous ces jours heureux,
    Où mon coeur crédule et sincère
    Vous présenta ses premiers voeux.
    Combien alors vous m'étiez chère !
    Quels transports ! quel égarement !
    Jamais on ne parut si belle
    Aux yeux enchantés d'un amant ;
    Jamais un objet infidèle
    Ne fut aimé plus tendrement.
    Le temps sut vous rendre volage ;
    Le temps a su m'en...

  • Oranger, dont la voûte épaisse
    Servit à cacher nos amours,
    Reçois et conserve toujours
    Ces vers, enfants de ma tendresse ;
    Et dis à ceux qu'un doux loisir
    Amènera dans ce bocage,
    Que si l'on mourait de plaisir,
    Je serais mort sous ton ombrage.

  • À Éléonore.

    Enfin, ma chère Éléonore,
    Tu l'as connu ce péché si charmant,
    Que tu craignais, même en le désirant ;
    En le goûtant, tu le craignais encore.
    Eh bien ! dis-moi : qu'a-t-il donc d'effrayant ?
    Que laisse-t-il après lui dans ton âme ?
    Un léger trouble, un tendre souvenir,
    L'étonnement de sa nouvelle flamme,
    Un doux regret, et surtout...

  • Rions, chantons, ô mes amis,
    Occupons-nous à ne rien faire,
    Laissons murmurer le vulgaire,
    Le plaisir est toujours permis.
    Que notre existence légère
    S'évanouisse dans les jeux.
    Vivons pour nous, soyons heureux,
    N'importe de quelle manière.
    Un jour il faudra nous courber
    Sous la main du temps qui nous presse ;
    Mais jouissons dans la...

  • Déjà la nuit s'avance, et, du sombre orient,
    Ses voiles par degrés dans les airs se déploient.
    Sommeil, doux abandon, image du néant,
    Des maux de l'existence heureux délassement,
    Tranquille oubli des soins où les hommes se noient ;
    Et vous, qui nous rendez à nos plaisirs passés,
    Touchante Illusion, déesse des mensonges,
    Venez dans mon asile, et sur mes...

  • Toujours le malheureux t'appelle,
    Ô nuit, favorable aux chagrins !
    Viens donc, et, porte sur ton aile
    L'oubli des perfides humains.
    Voile ma douleur solitaire ;
    Et, lorsque la main du Sommeil
    Fermera ma triste paupière,
    Ô dieux ! reculez mon réveil ;
    Qu'à pas lents l'aurore s'avance
    Pour ouvrir les portes du jour :
    Importuns, gardez le...

  • D'un air languissant et rêveur
    Justine a repris son ouvrage ;
    Elle brode ; mais le bonheur
    Laissa sur son joli visage
    L'étonnement et la pâleur.
    Ses yeux qui se couvrent d'un voile
    Au sommeil résistent en vain ;
    Sa main s'arrête sur la toile,
    Et son front tombe sur sa main.
    Dors et fuis un monde malin :
    Ta voix plus douce et moins...

  • Le sommeil a touché ses yeux ;
    Sous des pavots délicieux
    Ils se ferment, et son coeur veille.
    A l'erreur ses sens sont livrés.
    Sur son visage par degrés
    La rose devient plus vermeille ;
    Sa main semble éloigner quelqu'un :
    Sur le duvet elle s'agite ;
    Son sein impatient palpite
    Et repousse un voile importun.
    Enfin, plus calme et plus...

  • Apprenez, ma belle,
    Qu'à minuit sonnant,
    Une main fidèle,
    Une main d'amant,
    Ira doucement,
    Se glissant dans l'ombre,
    Tourner les verrous
    Qui dès la nuit sombre,
    Sont tirés sur vous.
    Apprenez encore
    Qu'un amant abhorre
    Tout voile jaloux.
    Pour être plus tendre,
    Soyez sans atours,
    Et songez à prendre
    L'habit des Amours....

  • Chantons les amours de Lubin,
    Nuit et jour il soupire en vain :
    Hélas ! sans espérance.
    Lise, pourtant, l'aime en secret ;
    Mais il l'ignore, et n'oserait
    Parler de sa, parler de sa,
    Parler de sa constance.

    Content d'admirer ses attraits,
    Il n'ose approcher de trop près,
    Tant Lubin est honnête :
    Il croit, sans se rendre suspect,...