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    My gentle Harp ! once more I waken
    The sweetness ofthy slumbering strain.
    TH. MOORE.

    Ma douce Harpe ! j’éveille encore le charme
    de tes accords endormis.

    Pauvre harpe du barde, au lambris suspendue,
    Tu dormais, dès long-temps poudreuse et détendue.
    D’un souffle vagabond la brise de la nuit
    Sur ta corde...

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    Quand on est sous l’enchantement
    D’une faveur d’amour nouvelle,
    On s’en défendrait vainement,
    Tout le révèle :

    Comme fuit l’or entre les doigts,
    Le trop-plein de bonheur qu’on sème,
    Par le regard, le pas, la voix,
    Crie : elle m’aime !

    Quelque chose d’aérien
    Allège et soulève la vie,
    Plus rien ne fait peine, et plus rien...

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    Dans les beaux jours d’été, quand un soleil splendide,
    A l’habit riche et fin comme au haillon sordide,
    Verse, sans les compter, ses bienfaisants rayons,
    Je m’en vais bien souvent, seul avec mes crayons,
    Sur les grands boulevards, au travers de la foule,
    Qui, comme un fleuve immense, autour de moi s’écoule ;
    Drapé dans mes haillons, je vois à mes...

  • La terre par moments doute ; on ne comprend plus.
    L'homme a devant les yeux de la brume, un reflux,
    On ne sait quoi de pâle et de crépusculaire ;
    On n'a plus d'allégresse, on n'a plus de colère ;
    La disparition produit l'effarement.
    L'œil fauve du hibou regarde affreusement.
    Toutes sortes d'éclairs inexplicables brillent.
    L'autel penche, et les vers du...

  • Approchez, aimable écolière,
    Vous qui fûtes maîtresse un jour ;
    Approchez, et, moins familière
    Avec Lhomond qu’avec l’amour,
    Instruisez-vous : chacun son tour.
    Mais, par un doux air de folie,
    Grand Dieu ! comme elle est embellie.
    Finissez, Rose, finissez :
    Est-ce l’instant d’être jolie ?
    Finissez, Rose, finissez,
    Je suis le maître,...

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    « Ça vous surprend que j’fume, et que j’prise, et que j’chique ?
    Vous vous dit’ que pour moi qu’a besoin d’épargner
    C’est un’ trop gross’ dépense et qu’ça doit me ruiner ?
    Mais, j’fais du mêm’ tabac trois usag’ tabagiques.

    Mon bout d’carotte, es’ pas ? j’ai fini de l’mâcher,
    I...

  • Elle voyage à sa façon
    Autour d’un petit rocher maigre ;
    Son ruisseau, chuchoteur allègre.
    Est caché par un grand buisson.

    Tandis qu’un merle polisson
    Raille un pivert à la voix aigre,
    Elle voyage à sa façon
    Autour d’un petit rocher maigre.

    Et, lente comme un limaçon,
    Noire comme la peau d’un nègre,
    Narguant le poivre et le...

  • Trente-neuf ans, fortune ronde,
    Célibataire et bon garçon,
    Depuis qu’on m’avait mis au monde
    J’habitais à Pont-à-Mousson.
    Jamais — de mes destins propices
    Poursuivant le cours régulier —
    Je n’avais mangé d’écrevisses
    En cabinet particulier.

    Fidèle à ma ville natale,
    Je n’...

  • Chaque enfant qu’on enseigne est un homme qu’on gagne.
    Quatre vingt-dix voleurs sur cent qui sont au bagne
    Ne sont jamais allés à l’école une fois,
    Et ne savent pas lire, et signent d’une croix.
    C’est dans cette ombre-là qu’ils ont trouvé le crime.
    L’ignorance est la nuit qui commence l’abîme.
    Où rampe la raison, l’honnêteté périt.

    Dieu, le premier...

  • J’ai naguère habité le meilleur des châteaux
    Dans le plus fin pays d’eau vive et de coteaux :
    Quatre tours s’élevaient sur le front d’autant d’ailes,
    Et j’ai longtemps, longtemps habité l’une d’elles.
    Le mur, étant de brique extérieurement,
    Luisait rouge au soleil de ce site dormant,
    Mais un lait de chaux, clair comme une aube qui pleure,
    Tendait...