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    Poète au gosier d’or, enfant de nos savanes,
    Toi qui, fuyant ton nid caché sous l’herbe en pleurs,
    Te berçais dans la brise au roulis des lianes,
    Et chantais la lumière au front des bois en fleurs ;

    D’où viens-tu pour tomber tremblant à ma fenêtre,
    Loin des citronniers verts de notre île d’azur ?
    Au pays des palmiers toi que le ciel fit naître,...

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    LE BENGALI

    Il était né dans la rizière
    Qui borde l’étang de Saint-Paul.
    Heureux, il vivait de lumière,
    De chant libre et de libre vol.

    Poète ailé de la savane,
    Du jour épiant les lueurs,
    Il disait l’aube diaphane,
    Bercé sur la fataque en fleurs.

    Il hantait les gérofleries
    Aux belles grappes de corail
    Et, parmi les...

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    Or, sous le ciel ardent, les murs de brique rose
    Étincelaient ; le vent chantait dans les palmiers ;
    La fraîche Dammeseq, comme une fleur éclose,
    Enivrait le vallon des parfums coutumiers.

    Et les eaux murmuraient, et les sources prochaines
    D’un fluide cristal emplissaient les viviers ;
    Et les souffles du nord berçaient de leurs haleines
    La...

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    Il dort, mon Bénoni, bien moins souffrant sans doute,
    C’est le premier sommeil qu’aussi longtemps il goûte ;
    Il dort depuis hier que, le regard terni,
    Dans sa débile main il a serré la mienne,
    Disant : Vous m’aimez tous ! maintenant qu’elle vienne !…
    Il dort, mon Bénoni !

    Il dort, mon Bénoni ! viens le voir, il repose ;
    Marche bien doucement...

  • La Liberté chez nous se réfugie ;
    Joyeux buveurs, à table et loin du jour,
    Que Béranger, pour terminer l’orgie,
    De ses refrains nous enivre à son tour.
    Chargé de gloire et d’injures nouvelles,
    Des bras d’un peuple il tombe dans les fers ;
    Il est captif, mais sa muse a des ailes :
    Tout bas, tout bas, amis, chantons ses vers !

    Quand tour à tour au...

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    Lacte ferino !

    À l’ombre d’un figuier superbe,
    Prés d’un fleuve aux bords inconnus,
    Deux enfants sont couchés dans l’herbe,
    Frais, souriants, et demi-nus ;

    Le grand ciel bleu les environne,
    Un dernier rayon du soleil
    Semble poser une couronne
    Sur leurs fronts joints par le sommeil ;

    Et la brise qui vient des ondes,
    ...

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    Ma mère, elle a voulu garder, la sainte femme,
    Mon massif berceau d’autrefois ;
    Il rêve dans un coin aux jours d’épithalame
    Où moi, l’enfant nouveau, j’avais une jeune âme
    Et la mère une jeune voix.

    Mais la voix s’est usée et plus jamais ne chante
    Puisque les enfants sont grandis ;
    Et moi, je m’use aussi dans la foule méchante
    Et le...

  • Qu’a-t-on fait du bocage où rêva mon enfance ?
    Oh ! je le vois toujours ! j’y voudrais être encor !
    Au milieu des parfums j’y dormais sans défense,
    Et le soleil sur lui versait des rayons d’or.
    Peut-être qu’à cette heure il colore les roses,
    Et que son doux reflet tremble dans le ruisseau.
    Viens couler à mes pieds, clair ruisseau qui l’arroses ;
    Sous...

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    Au comte de Trévelec.

    Endormons-nous, petit chat noir.
    Voici que j’ai mis l’éteignoir
             Sur la chandelle.
    Tu vas penser à des oiseaux
    Sous bois, à de félins museaux...
             Moi rêver d’Elle.

    Nous n’avons pas pris de café,
    Et, dans notre lit bien chauffé
             (Qui veille pleure.)

    Nous dormirons...

  • C’est le matin, l’enfant, la paupière mi-close,
    Sur le sein maternel paisiblement repose.
    « — Chut ! » disait-elle avec un doux air inquiet,
    « Tout à l’heure il rêvait sans doute, il souriait
    « Même en dormant, & moi, quoique ce soit étrange
    « Et bien fou, n’est-ce pas ? j’imagine qu’un ange
    « À notre chérubin vient encore parler
    « Lorsque nous le...