• De l’éternel Azur la sereine ironie
    Accable, belle indolemment comme les fleurs
    Le poëte impuissant qui maudit son génie
    À travers un désert stérile de douleurs.

    Fuyant, les yeux fermés, je le sens qui regarde
    Avec l’intensité d’un remords atterrant,
    Mon âme vide : où fuir ? et quelle nuit hagarde
    Jeter, lambeaux, jeter sur ce mépris navrant.

    ...

  •  
    À madame Judith Mendès.

    À la fin de juillet les villages sont vides.
    Depuis longtemps déjà des nuages livides,
    Menaçant d’un prochain orage à l’occident,
    Conseillaient la récolte au laboureur prudent.
    Donc voici la moisson, et bientôt la vendange ;
    On aiguise les faux, on prépare la grange,
    Et tous les paysans, dès l’aube rassemblés,...

  •  
    Nous ferons l’aïoli ! C’est dit ! Et chacun rêve
    De cabanons parmi les pins, près de la grève,
    Où, tandis que les uns pêchent quelque poisson,
    La ligne en main, tirant trop souvent l’hameçon,
    Tandis que moins ardents les autres font un somme,
    Le plus connu pour son adresse, le vieil homme
    Habile à bien broyer dans le mortier profond
    L’ail roux...

  • Bavardes comme des perruches,
    Elles cheminent vers le puits
    Qui bâille au milieu des grands buis,
    — Les abeilles rentrent aux ruches,

    En grignotant le pain des huches,
    Elles font des haltes, et puis,
    Bavardes comme des perruches,
    Elles cheminent vers le puits.

    Elles vont balançant leurs cruches,
    Et moi, des yeux, tant que je puis,
    ...

  •  
    Frais comme l’herbe qui pousse,
    Dans la ferme où je me plus,
    Le baby suçait son pouce.

    Le merle qui se trémousse
    Dans les buissons chevelus
    Frais comme l’herbe qui pousse,

    Le roc où l’éclair s’émousse
    L’attiraient ; roi des joufflus,
    Le baby suçait son pouce.

    Il se roulait dans la mousse
    Et grimpait sur les talus
    ...

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    LE POÈTE

    C’est à moi qu’appartient le plus jeune des dieux !
    La flûte doit céder au chant mélodieux.
    Que cette Phrygienne à la voix trop hardie
    Résonne sans troubler la sainte mélodie
    Et, comme une servante, accompagne le chœur.
    J’exalterai le dieu qui fait bondir mon cœur ;
    Celui que Sémélé, paie, heureuse, éblouie,
    Ayant reçu de Zeus...

  • C’est toi, divin Bacchus, dont je chante la gloire :
    Nymphes, faites silence, écoutez mes concerts.
          Qu’un autre apprenne à l’univers
    Du fier vainqueur d’Hector la glorieuse histoire ;
          Qu’il ressuscite, dans ses vers,
    Des enfants de Pélops l’odieuse mémoire :
    Puissant dieu des raisins, digne objet de nos vœux,
          C’est à toi seul que je...

  • Les badauds faisaient des expériences
    où l’on voyait la foule en pantalons courts.
    On tirait des étincelles avec ignorance
    et on risquait d’être foudroyé du coup.

    On montait des ballons ornés comme un théâtre.
    Ils n’allaient pas bien et on se tuait.
    Les frères Montgolfier avaient de l’audace.
    L’Académie des sciences s’émouvait.

  • C'est à Paris qu'on voit la foule
    Se rassembler au moindre bruit ;
    Si c'est un pochard qui se roule,
    Prenant le ruisseau pour son lit...
    Le sage en passant le contourne,
    Mais... le badaud s'arrêtera,
    Tant que la terre tourne, tourne,
    Tant que la terre tournera

    Refrain

    Badauds par ci,
    Badauds par là,
    Faisant ceci...
    ...

  •  
    Bah ! (Ce n’est pas à vous que l’on parle, madame),
    Après tout, laissons-nous promener par la lame.
    Elle est douce, elle est forte, elle sent bon la mer,
    Son haleine est salée avec un goût amer,
    Elle est ronde et nerveuse, elle chante, elle gronde,
    Et c’est un véhicule aimable sur le monde,
    Sa transparence aussi forme un miroir vivant,
    ...