ORIANE
Ô fils resplendissants, ô fils couleurs d’étoile,
Serez-vous le manteau d’un prince ou bien le voile
D’une reine ?... Non, non, fils couleur du printemps,
Je veux que vous soyez les clairs rideaux flottants
Éployés sur le lit ardent d’une amoureuse,
Comme un pavillon d’or sur une barque heureuse.
Un silence. Le rouet...
Les lilas qui avaient fleuri l’année dernière
vont fleurir de nouveau dans les tristes parterres.
Déjà le pêcher grêle a jonché le ciel bleu
de ses roses, comme un enfant la Fête-Dieu.
Mon cœur devrait mourir au milieu de ces choses,
car c’était au milieu des vergers blancs et roses
que j’avais espéré je ne sais quoi de vous.
Mon âme rêve sourdement...
Ma chère, tu cueillais, en riant aux échos,
Des gerbes de bleuets et de coquelicots.
O journée en plein air, adorable et trop brève !...
Et, dans le large lit d’auberge où j’ai dormi
En sentant, prés du mien, battre ton cœur ami,
Pendant toute la nuit, j’ai vu des fleurs en rêve.
Le beau jardin fleuri de flammes
Qui nous semblait le double ou le miroir
Du jardin clair que nous portions dans l'âme
Se cristallise en gel et or, ce soir.
Un grand silence blanc est descendu s'asseoir
Là-bas, aux horizons de marbre,
Vers où s'en vont, par défilé, les arbres
Avec leur ombre immense et bleue
Et régulière, à côté d'eux.
...
