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        Je subis la langueur du jour déjà pâli…
        Je suis très lasse, et je ne veux plus que l’oubli.

        Si l’on parle de moi, l’on mentira sans doute.
        Et mes pieds ont été déchirés par la route.

        Certes, on doit trouver plus loin des cieux meilleurs,
        Des visages plus doux… Je veux aller ailleurs…

        Je vous l’ai dit, je suis affaiblie...

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        Voici l’été… Les jours sont trop longs, mon amie,
        L’ombre tarde… On attend l’heure du grand repos,
        Des lys plus odorants, de la cloche endormie,
        De la grande fraîcheur des feuilles et des eaux.

        Je m’attriste de la clarté qui se prolonge.
        Mon cœur est l’ennemi des midis éclatants,
        Et malgré que les jours soient beaux comme...

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        Mon cœur n’est rassuré qu’à demi… Mes Dieux lares
        Revêtent, ce jour-ci, des formes très bizarres.

        Leur regard est comme un poignard mal émoussé…
        Et je tremble, craignant leur aspect courroucé…

        C’est toi qui me maudis et c’est toi qui me damnes…
        Et cependant je vous servis bien, ô les Manes !…

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        Je subis tout mon sort… L’impérieux poème
        Me domine à l’égal de la femme qu’on aime.

        Amèrement jaloux, despotique et méchant,
        Voici que vient régner, sur mon âme, le chant.

        Servilement je sers l’impérieux poème,
        Mille fois plus aimé que la femme qu’on aime.

        Qu’il soit méchant, qu’il soit tyrannique et jaloux,
        ...

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    Douceur de mes chants, allons vers Mytilène,
    Voici que mon âme a repris son essor,
    Nocturne et craintive ainsi qu’une phalène     
        Aux prunelles d’or.

    Allons vers l’accueil des vierges adorées :
    Nos yeux connaîtront les larmes des retours :
    Nous verrons enfin s’...

  • Du ciel poli comme un miroir
    Pleuvent les langueurs enflammées,
    Et nous suivons, au cœur du soir,
    L’irréel essor des fumées.

    J’adore tes gestes meurtris
    Et tes prunelles embrumées…
    Tu regrettes… Dans tes yeux gris
    Passent et...

  • J’ai vu s’éteindre en moi le brûlant désespoir…
    Ma bouche cessera de ravager ta bouche,
    Je ne connaîtrai plus les veilles sur la couche
    De la moite Insomnie et du Désir farouche,

    Car la Mer et la Mort me rappellent, ce soir…

    La nuit...

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        J’étais pareille à la voyageuse recrue,
        Lasse enfin des courants et des vents et du sort
        Et qui n’aspire plus qu’au bon sommeil du port…
        Miraculeusement vous m’êtes apparue…

        Et vous ressembliez à tout ce qui m’est cher,
        Aux jardins de juillet dans leur douceur croissante,
        Aux parfums respirés au détour d’une sente,...

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    Le ciel l’encadre ainsi que ferait une châsse,
    Et je vivrais cent ans sans jamais la revoir.
    Elle est soudaine : elle est le miracle du soir.
    L’instant religieux brille et tinte. Elle passe…

    Je suis venue avec la foule des lépreux
    Dès l’aurore, ayant su que je serais guérie.
    Ils regardent vers elle avec l’idolâtrie
    En pleurant à voix basse. Et...

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        Le soir était plus doux que l’ombre d’une fleur.
        J’entrai dans l’ombre ainsi qu’en un parfait asile.
        La Voix, récompensant mon attente docile,
        Me chuchota : « Vois le palais de la Douleur. »

        Mes yeux las s’enchantaient du violet, couleur
        Unique, car le noir dominait. Immobile,
        La Douleur demeurait assise, très tranquille...