•  
    C’est une vieille fille en cheveux blancs ; elle est
    Pâle et maigre ; un antique et grossier chapelet
    S’égrène, machinal, sous ses doigts à mitaines.
    Sans cesse remuant ses lèvres puritaines
    D’où tombent les Pater noster et les Ave,
    Et laissant son tricot de laine inachevé,
    Droite, elle prie, assise au coin d’un feu de veuve,
    Dans...

  •  
    I

    La veille de la Sainte-Agnès, ah ! comme le froid était âpre !
    Le hibou, malgré toutes ses plumes, était perclus.
    Le lièvre boitait, tout tremblant, par l’herbe glacée
    Et silencieux était le troupeau dans son bercail laineux.
    Gourds étaient les doigts du diseur de chapelets
    Tandis qu’il égrenait son rosaire et que son souffle glacé
    Comme...

  • Un jour ma Sainte au temple saint oroit.
    Au ciel estoit le bruit de son silence,
    Comme un Soleil reluisoit sa presence,
    Et tout le lieu de son ombre doroit.

    L'image en Croix de cil qu'elle adoroit,
    Signes monstroit de grand' benivolence
    Saintes et Saints luy faisoient reverence,
    Et tout le temple honoré l'honoroit.

    Ce que j'en dy n'est...

  • Je fais sepulchre à ton loz de mes vers,
    Vers, qu'Amour mesme ha pour nous fait si fors,
    Qu'ilz ne craindront de la mort les effors,
    Quand nous serons tous deux rongez des vers :

    Tant que la vive ame de l'Univers,
    Fera tourner la roue des sept corps,
    Qui l'harmonie engendrent des accors,
    Que font tousjours leurs mouvemens divers :

    Le...

  • Quand à mes vers je veux matiere élire
    Ma fantaisie au fin commencement
    Du nom, lequel je ly devotement
    DE ce saint nom me commende d'ecrire :

    Mais quand je vien à un peu apres lire
    Elle me chante alors tout autrement,
    N'y touche pas (dit elle) follement,
    N'Y touche pas, ta main n'y peut suffire :

    Puis quand j'en veux davantage savoir...

  • A la fenêtre recélant
    Le santal vieux qui se dédore
    De sa viole étincelant
    Jadis avec flûte ou mandore,

    Est la Sainte pâle, étalant
    Le livre vieux qui se déplie
    Du Magnificat ruisselant
    Jadis selon vêpre et complie :

    A ce vitrage d'ostensoir
    Que frôle une harpe par l'Ange
    Formée avec son vol du soir
    Pour la délicate phalange...

  • Ici viennent mourir les derniers bruits du monde
    Nautoniers sans étoile, abordez ! c'est le port :
    Ici l'âme se plonge en une paix profonde,
    Et cette paix n'est pas la mort.

    Ici jamais le ciel n'est orageux ni sombre ;
    Un jour égal et pur y repose les yeux.
    C'est ce vivant soleil, dont le soleil est l'ombre,
    Qui le répand du haut des cieux.

    ...

  • Par le chemin des vers luisants,
    De gais amis à l'âme fière
    Passent aux bords de la rivière
    Avec des filles de seize ans.
    Beaux de tournure et de visage,
    Ils ravissent le paysage
    De leurs vêtements irisés
    Comme de vertes demoiselles,
    Et ce refrain, qui bat des ailes,
    Se mêle au vol de leurs baisers :

    Avec nous l'on chante et l'on aime,...

  • Une Sainte en son auréole,
    Une Châtelaine en sa tour,
    Tout ce que contient la parole
    Humaine de grâce et d'amour ;

    La note d'or que fait entendre
    Un cor dans le lointain des bois,
    Mariée à la fierté tendre
    Des nobles Dames d'autrefois ;

    Avec cela le charme insigne
    D'un frais sourire triomphant
    Eclos dans des candeurs de cygne
    ...

  • A la sainte, martyre et vierge,
    Et de son sexe l'ornement,
    Vous allez porter un cierge
    Et la prier dévotement

    De garder le bleu turquoise
    A vos yeux plus bleus que l'azur,
    Et la couleur d'une framboise
    A votre bouche au dessin pur ;

    De conserver pour les noisettes
    Vos dents de perle et de granit,
    Et d'élargir les deux...