• Enfant dont la lèvre rit
    Et, gracieuse, fleurit
    Comme une corolle éclose,
    Et qui sur ta joue en fleurs
    Portes encor les couleurs
    Du soleil et de la rose !

    Pendant ces jours filés d'or
    Où tu ressembles encor
    À toutes les choses belles,
    Le vieux poète bénit
    Ton enfance, et le doux nid
    Où ton âme ouvre ses ailes.

    Hélas !...

  • Dans un café plus noir qu’un antre,
    En rang d’oignons sur un bahut,
    Six coquins regardent un ventre
    Qui danse tout seul le chahut.

    Avec ce ventre ferme et lisse
    Qu’agite un tordion subtil
    Plus d’un galant, sans la police,
    Irait bien trinquer du nombril.

  •  
    Solitude ! silence ! oh ! le désert me tente.
    L'âme s'apaise là, sévèrement contente ;
    Là d'on ne sait quelle ombre on se sent l'éclaireur.
    Je vais dans les forêts chercher la vague horreur ;
    La sauvage épaisseur des branches me procure
    Une sorte de joie et d'épouvante obscure ;
    Et j'y trouve un oubli presque égal au tombeau.
    Mais je ne m'...

  •  
    Le vieux palais attend la princesse saxonne
    Qui des derniers Capets veut sauver les enfants ;
    Charlemagne, attentif à ses pas triomphants,
    Crie à Napoléon que Charles-Quint pardonne.

    Mais deux rois à la grille attendent en personne ;
    Quel est le souvenir qui les tient si tremblants
    Que l’aïeul aux yeux morts s’en retourne à pas lents,
    ...

  • Henri Cinq ! à ce nom n’augurez point d’outrage
    Pour l’héritier des lis, emporté par l’orage.
    Où l’on salue un roi, je ne vois qu’un enfant,
    Et respecte le front que sa candeur défend.
    Pourquoi te maudirai-je ? infortuné ! sans doute,
    Tu hais la royauté plus qu’on ne la redoute ;
    Je garde ma colère à tes bourreaux, à ceux
    Qui stimulent pour toi l’...

  • VIII

    J’étais adolescent quand vous étiez enfant ;
    J’ai sur votre berceau fragile et triomphant
    Chanté mon chant d’aurore ; et le vent de l’abîme
    Depuis nous a jetés chacun sur une cime,
    Car le malheur, lieu sombre où le sort nous admet,
    Etant battu de coups de foudre, est un sommet.
    Le gouffre est entre nous comme entre les deux...

  •  
          Comme l’autre Ophélie,
          Dont la douce folie
          S’endort en murmurant
               Dans le torrent,

          Pâle, déchevelée
          Et dans l’onde étoilée
          Éparpillant encor
               Ses tresses d’or,

          Et comme Juliette,
          Qui craignait l’alouette
          Éveillée au matin
               Parmi le thym...

  •  
    Si quelque jour ce livre, où ma pauvre âme en pleurs
    A la Muse a conté ses plus chères douleurs,
    Se trouvait sous vos mains, ouvrez-le : sous le voile
    Du symbole, à vos yeux se lèvera l’Étoile
    Dont le culte en mon cœur, culte unique et sacré,
    A grandi par l’épreuve et par l’âge épuré.
    Bien des jours ont passé depuis l’heure fatale
    Et bénie où...

  • EN REPONSE À L’ENVOI D’UN FRAGMENT DE L’« APOTHÉOSE D’HOMÈRE »

    Du plafond où, les pieds sur le blanc escabeau,
    Trône Homère, au milieu de l’immortelle foule
    Dont le chœur dans l’azur s’étage et se déroule,
    Pour m’en faire présent tu coupas un lambeau.

    Merci, maître invaincu, prêtre fervent du beau,
    Qui de la forme pure as conservé le moule...

  •  

    Sans avoir contemplé la plage où sont éclos
    Tes poèmes vibrants d’amour et d’espérance,
    Maître, depuis longtemps je connais la Provence,
    Sa Lyre aux larges vers, son Rhône aux larges flots.

    Ton cher pays me hante, et, malgré la distance,
    Je perçois le soleil qui dore ses tombeaux ;
    J’entends la grande voix du mistral sur les baus,
    Je hume la...