• Se voir le plus possible et s'aimer seulement,
    Sans ruse et sans détours, sans honte ni mensonge,
    Sans qu'un désir nous trompe, ou qu'un remords nous ronge,
    Vivre à deux et donner son coeur à tout moment ;

    Respecter sa pensée aussi loin qu'on y plonge,
    Faire de son amour un jour au lieu d'un songe,
    Et dans cette clarté respirer librement -
    Ainsi...

  • LA MUSE

    Depuis que le soleil, dans l'horizon immense,
    A franchi le Cancer sur son axe enflammé,
    Le bonheur m'a quittée, et j'attends en silence
    L'heure où m'appellera mon ami bien-aimé.
    Hélas ! depuis longtemps sa demeure est déserte ;
    Des beaux jours d'autrefois rien n'y semble vivant.
    Seule, je viens encor, de mon voile couverte,
    Poser mon...

  • Tu te frappais le front en lisant Lamartine,
    Edouard, tu pâlissais comme un joueur maudit ;
    Le frisson te prenait, et la foudre divine,
    Tombant dans ta poitrine,
    T'épouvantait toi-même en traversant ta nuit.

    Ah ! frappe-toi le coeur, c'est là qu'est le génie.
    C'est là qu'est la pitié, la souffrance et l'amour ;
    C'est là qu'est le rocher du désert de la...

  • (extrait)

    ...Lorsque dans le désert la cavale sauvage,
    Après trois jours de marche, attend un jour d'orage
    Pour boire l'eau du ciel sur ses palmiers poudreux,
    Le soleil est de plomb, les palmiers en silence
    Sous leur ciel embrasé penchent leurs longs cheveux ;
    Elle cherche son puits dans le désert immense,
    Le soleil l'a séché ; sur le rocher...

  • Lorsque j'ai lu Pétrarque, étant encore enfant,
    J'ai souhaité d'avoir quelque gloire en partage.
    Il aimait en poète et chantait en amant ;
    De la langue des dieux lui seul sut faire usage.

    Lui seul eut le secret de saisir au passage
    Les battements du coeur qui durent un moment,
    Et, riche d'un sourire, il en gravait l'image
    Du bout d'un stylet d'or sur un...

  • Jusqu'à présent, lecteur, suivant l'antique usage,
    Je te disais bonjour à la première page.
    Mon livre, cette fois, se ferme moins gaiement ;
    En vérité, ce siècle est un mauvais moment.

    Tout s'en va, les plaisirs et les moeurs d'un autre âge,
    Les rois, les dieux vaincus, le hasard triomphant,
    Rosafinde et Suzon qui me trouvent trop sage,
    Lamartine...

  • J'espérais bien pleurer, mais je croyais souffrir
    En osant te revoir, place à jamais sacrée,
    O la plus chère tombe et la plus ignorée
    Où dorme un souvenir !

    Que redoutiez-vous donc de cette solitude,
    Et pourquoi, mes amis, me preniez-vous la main,
    Alors qu'une si douce et si vieille habitude
    Me montrait ce chemin ?

    Les voilà, ces coteaux, ces...

  • Sonnet

    Ainsi, mon cher ami, vous allez donc partir !
    Adieu ; laissez les sots blâmer votre folie.
    Quel que soit le chemin, quel que soit l'avenir,
    Le seul guide en ce monde est la main d'une amie.

    Vous me laissez pourtant bien seul, moi qui m'ennuie.
    Mais qu'importe ? L'espoir de vous voir revenir
    Me donnera, malgré les dégoûts de la vie,...

  • Jamais, avez-vous dit, tandis qu'autour de nous
    Résonnait de Schubert la plaintive musique ;
    Jamais, avez-vous dit, tandis que, malgré vous,
    Brillait de vos grands yeux l'azur mélancolique.

    Jamais, répétiez-vous, pâle et d'un air si doux
    Qu'on eût cru voir sourire une médaille antique.
    Mais des trésors secrets l'instinct fier et pudique
    Vous couvrit de...

  • Beau chevalier qui partez pour la guerre,
    Qu'allez-vous faire
    Si loin d'ici ?
    Voyez-vous pas que la nuit est profonde,
    Et que le monde
    N'est que souci ?

    Vous qui croyez qu'une amour délaissée
    De la pensée
    S'enfuit ainsi,
    Hélas ! hélas ! chercheurs de renommée,
    Votre fumée
    S'envole aussi.

    Beau chevalier qui partez pour la...