• Tu vivais tant ! Toujours dans le bois qui t’invite,
    Et jamais fatigué, haïssant de t’asseoir,
    On avait tant de peine à t’endormir le soir,
    Et ton sommeil d’oiseau se réveillait si vite !

    Tes nuits s’inquiétaient d’une haleine de l’air,
    Comme un canot tressaille encore dans la crique ;
    Chargé de vie hélas ! ton repos électrique
    Laissait à tes yeux...

  • J’ai perdu la forêt, la plaine
    Et les frais avrils d’autrefois.
    — Donne tes lèvres ! leur haleine,
    Ce sera le souffle des bois !

    J’ai perdu l’Océan morose,
    Son deuil, ses vagues, ses échos.
    — Dis-moi n’importe quelle chose,
    Ce sera la rumeur des flots !

    Sans repos, sans ombre amicale,
    Front lourd, sous le soleil, je fuis…
    — Oh !...

  • Cette nuit-là, le vent, par tonnantes saccades,
    D’un bout à l’autre bout de l’horizon roulait,
    Et les nuages bas s’effondraient en cascades.

    Nuit lugubre. Parfois un éclair violet,
    Bref comme un coup de fouet, cinglait les vastes ombres :
    Alors le long Volga, fugace, étincelait ;

    Car c’était dans les bois & dans les steppes sombres
    Où Blèda,...

  •  
    Nos ancêtres, sortis de la vieille Armorique,
    Après un siècle entier d’une lutte homérique,
    Aux plaines d’Abraham succombèrent enfin,
    Écrasés par le nombre et vaincus par la faim,
    Louis quinze étant sourd aux longs cris de souffrance
    Qui s’élevaient des bords de la Nouvelle-France.
    Et nous fûmes conquis. Que dis-je ? les vainqueurs
    Eurent notre...

  • Je ne suis plus enfant : trop lents pour mon envie,
    Déjà dix-sept printemps ont passé dans ma vie :
    Je possède une lyre ; et cependant mes mains
    N’en tirent, dès long-temps, que des sons incertains......
    Oh ! quand viendra le jour où, libre de sa chaîne,
    Mon cœur ne verra plus la gloire, son amour,
    Aux songes de la nuit se montrer incertaine,
    Pour s’...

  •  
    Sitôt que ma leçon se trouvait terminée,
    J’allais au bord du lac achever ma journée
    Et rire avec le flot qui bondissait joyeux ;
    Et sur le sable d’or de la riante grève,
    Je m’endormais parfois pour écouter en rêve
    La sereine chanson du lac harmonieux.

    Ou bien je regardais passer les longs nuages
    Semblant un vol puissant de beaux cygnes...

  • Enfant, dors dans ta corbeille;
    Plus beau que la fleur vermeille,
    Dors ! ta mère sur toi veille
    Comme un ange protecteur.
    Suspendus à ton sourire,
    A ta lèvre qui respire,
    Ses regards cherchent à lire
    Les doux rêves de ton cœur.

    Les palais de la lumière,
    Le cieux où tu fus naguère,
    Une riante chimère
    Les peint sans doute à tes...

  •     Toujours je pleure au nom de mon enfant :
        Sans sa beauté rien n’est beau dans ma vie.
    Du monde et de ses biens, c’est le seul que j’envie,
    Mais je ne l’attends plus, la mort me le défend.

        Je le revois dans la fleur éphémère ;
        Elle apparaît pour sourire et périr :
    Comme elle, mon enfant, sur le sein de sa mère,
    Après avoir souri, se...

  •  
    Enfant sur la terre on se traîne,
    Les yeux et l’âme émerveillés,
    Mais, plus tard, on regarde à peine
    Cette terre qu’on foule aux pieds.

    Je sens déjà que je l’oublie,
    Et, parfois, songeur au front las,
    Je m’en repens et me rallie
    Aux enfants qui vivent plus bas.

    Détachés du sein de la mère,
    De leurs petits pieds incertains
    ...

  • Ô père qu'adore mon père!
    Toi qu'on ne nomme qu'à genoux!
    Toi, dont le nom terrible et doux
    Fait courber le front de ma mère!

    On dit que ce brillant soleil
    N'est qu'un jouet de ta puissance;
    Que sous tes pieds il se balance
    Comme une lampe de vermeil.

    On dit que c'est toi qui fais naître
    Les petits oiseaux dans les champs,
    Et qui...